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Modification de Villes/Montluçon/sciences/La révolution française

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==LONDRES, le 15 Novembre 1789==
 
==LONDRES, le 15 Novembre 1789==
 
Très cher Hippolyte,
 
Très cher Hippolyte,
 
 
Pardonnez l'emportement de ma dernière lettre. Je suis rassurée d'apprendre que les émeutes populaires ne recueillent pas non plus votre entière approbation.
 
Pardonnez l'emportement de ma dernière lettre. Je suis rassurée d'apprendre que les émeutes populaires ne recueillent pas non plus votre entière approbation.
 
 
Mais laissons cela... Parlons plutôt d'un sujet qui me tient à coeur, le rencontre que je fis, il y a quelques jours, à l'ambassade de France È Londres. Je brûle de vous faire part de cette visite. Je me rendis là-bas lE 10 Novembre, en compagnie de mon père. Nous voulions rendre nos hommages
 
Mais laissons cela... Parlons plutôt d'un sujet qui me tient à coeur, le rencontre que je fis, il y a quelques jours, à l'ambassade de France È Londres. Je brûle de vous faire part de cette visite. Je me rendis là-bas lE 10 Novembre, en compagnie de mon père. Nous voulions rendre nos hommages
 
notre ambassadeur. Celui-ci, malheureusement, s'était absenté en province poux quelques jours. Nous fûmes reçus par Monsieur André de Chénier, jeunE secrétaire d'ambassade. Il ne fut pas long à nous raconter combien l'exi] qu'il vivait loin de sa patrie lui était pénible. Non qu'il fut très attaché
 
notre ambassadeur. Celui-ci, malheureusement, s'était absenté en province poux quelques jours. Nous fûmes reçus par Monsieur André de Chénier, jeunE secrétaire d'ambassade. Il ne fut pas long à nous raconter combien l'exi] qu'il vivait loin de sa patrie lui était pénible. Non qu'il fut très attaché
 
la France, car il est né à Constantinople, d'un père diplomate et d'une mare grecque. Mais la vie à Londres ne l'intéresse pas, d'autant plus qu'il sait que de grandes choses se passent de l'autre côté de la Manche. Il possède lE même attachement que vous pour la liberté et pour les principes de 1é révolution, à tel point que je pense que vous pourriez sans contrainte devenir amis. De plus, ce jeune homme est poète. Il nous a laissé entendre qu'il avaiécrit des Idylles. Monsieur de Chénier s'ennuie tant qu'il a conçu une poésif
 
la France, car il est né à Constantinople, d'un père diplomate et d'une mare grecque. Mais la vie à Londres ne l'intéresse pas, d'autant plus qu'il sait que de grandes choses se passent de l'autre côté de la Manche. Il possède lE même attachement que vous pour la liberté et pour les principes de 1é révolution, à tel point que je pense que vous pourriez sans contrainte devenir amis. De plus, ce jeune homme est poète. Il nous a laissé entendre qu'il avaiécrit des Idylles. Monsieur de Chénier s'ennuie tant qu'il a conçu une poésif
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scientifique, chargée de philosophie, qui chanterait un monde nouveau. Voyant
 
scientifique, chargée de philosophie, qui chanterait un monde nouveau. Voyant
 
intérêt qu'avaient suscité en nous les quelques vers qu'il nous avait lus,
 
intérêt qu'avaient suscité en nous les quelques vers qu'il nous avait lus,
 
nous en laissa une plaquette. J'aimerais, cher Hippolyte, que vous lisiez :es vers, et que, autour de vous, vous fassiez aimer ce jeune poète.
 
nous en laissa une plaquette. J'aimerais, cher Hippolyte, que vous lisiez :es vers, et que, autour de vous, vous fassiez aimer ce jeune poète.
 
 
N'est-il pas merveilleux de savoir que, au milieu des bouleversements :politiques, il existe une pensée poétique, pleine d'une ferveur nouvelle?
 
N'est-il pas merveilleux de savoir que, au milieu des bouleversements :politiques, il existe une pensée poétique, pleine d'une ferveur nouvelle?
 
 
Cher Hippolyte, j'aimerais posséder le talent de Chénier pour vous dire =~mbien je vous aime, et combien je suis moins malheureuse quand je vous cris..
 
Cher Hippolyte, j'aimerais posséder le talent de Chénier pour vous dire =~mbien je vous aime, et combien je suis moins malheureuse quand je vous cris..
 
 
fl MAI I I., I .E
 
fl MAI I I., I .E
 
 
==LONDRES, LE 25 NOVEMBRE 1789==
 
==LONDRES, LE 25 NOVEMBRE 1789==
 
Cher Hippolyte,
 
Cher Hippolyte,
 
 
J'ai, enfin, pu voir votre ami Monsieur de la Feuillade. Vraiment, je _zsespërais de le rencontrer, bien que j'eusse prolongé mon séjour à Londres ie plus d'une semaine. Enfin, hier, je me rendis une fois de plus à l'adresse :ue vous m'aviez indiquée. Là, tout paraissait aussi calme que de coutume. Néanmoins, la porte me fut ouverte, par un majordome anglais aux manières aussi froides que celles de ses compatriotes. Il me conduisit directement au second étage de l'hôtel où votre ami m'accueillit lui-même. Avant que j'eusse eu le temps de lui dire un mot, il me remercia cordialement pour la patience ;ue j'avais dû montrer pour attendre son arrivée. Il me dit ensuite quelques mots concernant notre terre d'exil, puis quelques mots de la situation en France après ce qu'il appela les "journées d'octobre". Je crus comprendre :u'il était bien aise d'avoir pu enfin quitter un pays où quelques individus taisaient trop cher payer à d'autres le prix qu'ils accordaient à la liberté. Enfin, il me tendit un petit paquet et un mot de vous. Nous ne pûmes nous entretenir plus longtemps car il me fit savoir qu'il craignait que la police ne le recherchât: on lui reprochait, me dit-il, d'avoir transporté frauduleusement certains papiers jugés dangereux par les ennemis du duc d'Orléans. Comprenant à demi-mot qu'il était un émissaire de ce prince du sang gui est soupçonné d'attiser des émeutes révolutionnaires jusqu'en Angleterre, je n'en demandai pas davantage et préférai partir. C'est ainsi que je rentrai dans mon hôtel, portant contre mon sein le mot charmant que vous me fîtes parvenir avec les livrets.
 
J'ai, enfin, pu voir votre ami Monsieur de la Feuillade. Vraiment, je _zsespërais de le rencontrer, bien que j'eusse prolongé mon séjour à Londres ie plus d'une semaine. Enfin, hier, je me rendis une fois de plus à l'adresse :ue vous m'aviez indiquée. Là, tout paraissait aussi calme que de coutume. Néanmoins, la porte me fut ouverte, par un majordome anglais aux manières aussi froides que celles de ses compatriotes. Il me conduisit directement au second étage de l'hôtel où votre ami m'accueillit lui-même. Avant que j'eusse eu le temps de lui dire un mot, il me remercia cordialement pour la patience ;ue j'avais dû montrer pour attendre son arrivée. Il me dit ensuite quelques mots concernant notre terre d'exil, puis quelques mots de la situation en France après ce qu'il appela les "journées d'octobre". Je crus comprendre :u'il était bien aise d'avoir pu enfin quitter un pays où quelques individus taisaient trop cher payer à d'autres le prix qu'ils accordaient à la liberté. Enfin, il me tendit un petit paquet et un mot de vous. Nous ne pûmes nous entretenir plus longtemps car il me fit savoir qu'il craignait que la police ne le recherchât: on lui reprochait, me dit-il, d'avoir transporté frauduleusement certains papiers jugés dangereux par les ennemis du duc d'Orléans. Comprenant à demi-mot qu'il était un émissaire de ce prince du sang gui est soupçonné d'attiser des émeutes révolutionnaires jusqu'en Angleterre, je n'en demandai pas davantage et préférai partir. C'est ainsi que je rentrai dans mon hôtel, portant contre mon sein le mot charmant que vous me fîtes parvenir avec les livrets.
 
 
Je vous sais gré de m'avoir envoyé ces livres. Je vous remercie surtout pour "Paul et Virginie": je suis certaine que cet ouvrage, même si l'amour y connaît un destin tragique, me rapprochera davantage de vous.
 
Je vous sais gré de m'avoir envoyé ces livres. Je vous remercie surtout pour "Paul et Virginie": je suis certaine que cet ouvrage, même si l'amour y connaît un destin tragique, me rapprochera davantage de vous.
 
 
EMIL.1F
 
EMIL.1F
 
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==PARIS, LE 10 DECEMBRE 1789==
 
==PARIS, LE 10 DECEMBRE 1789==
 
Chère Emilie,
 
Chère Emilie,
 
 
J'ai reçu votre dernière lettre avec un immense plaisir: je craignais en effet que vous n'eussiez pas pu rencontrer Monsieur de la Feuillade. Vous avez deviné juste: mon ami est à la charge du duc d'Orléans, qui est très mal vu à la cour en raison de ses idées démocrates. D'après les bruits qui courent, il est en ce moment-même à Londres. Il serait accompagné du capitaine Choderlos de Laclos, auteur des "Liaisons dangereuses", On m'a dit que c'était Laclos qui écrivait les articles du duc d'Orléans, dont il est, en quelque sorte, l'agent.
 
J'ai reçu votre dernière lettre avec un immense plaisir: je craignais en effet que vous n'eussiez pas pu rencontrer Monsieur de la Feuillade. Vous avez deviné juste: mon ami est à la charge du duc d'Orléans, qui est très mal vu à la cour en raison de ses idées démocrates. D'après les bruits qui courent, il est en ce moment-même à Londres. Il serait accompagné du capitaine Choderlos de Laclos, auteur des "Liaisons dangereuses", On m'a dit que c'était Laclos qui écrivait les articles du duc d'Orléans, dont il est, en quelque sorte, l'agent.
 
 
Ici, c'est le temps des compromissions: depuis la "trahison" de Mirabeau qui a pris le parti du roi, je ne sais plus très bien de quel côté me tourner. Il existe depuis peu à Paris la "Société des Amis de la Constitution", club installé dans la salle de la bibliothèque du couvent des Jacobins, rue Saint-Honoré. Les membres en sont des patriotes, décidés à combattre les anciennes bases de la société et à défendre le nouveau régime constitutionnel. Parmi eux, se distingue Maximilien Robespierre, jeune avocat dont les idées démocrates m'impressionnent. Ainsi vais-je régulièrement aux réunions de ce club au sein duquel je commence à me faire des amis.
 
Ici, c'est le temps des compromissions: depuis la "trahison" de Mirabeau qui a pris le parti du roi, je ne sais plus très bien de quel côté me tourner. Il existe depuis peu à Paris la "Société des Amis de la Constitution", club installé dans la salle de la bibliothèque du couvent des Jacobins, rue Saint-Honoré. Les membres en sont des patriotes, décidés à combattre les anciennes bases de la société et à défendre le nouveau régime constitutionnel. Parmi eux, se distingue Maximilien Robespierre, jeune avocat dont les idées démocrates m'impressionnent. Ainsi vais-je régulièrement aux réunions de ce club au sein duquel je commence à me faire des amis.
 
A Paris, en ce moment, peu de choses sont à signaler, si ce n'est que Marat, jeune médecin passionné par la cause populaire, fait entendre sa voix. Dans son journal "L'Ami du peuple", il défend avec violence les petites gens et les opprimés.
 
A Paris, en ce moment, peu de choses sont à signaler, si ce n'est que Marat, jeune médecin passionné par la cause populaire, fait entendre sa voix. Dans son journal "L'Ami du peuple", il défend avec violence les petites gens et les opprimés.
 
 
Il y a eu aussi le discours du docteur Guillotin, député du Tiers Etet, qui proposa à l'assemblée une "machine humanitaire", chargée de donner la mort de façon rapide. L'instantanéité de la mort se fait par la chute d'un couperet séparant la tête du tronc. Je ne sais quel avenir aura cette machine qui, pour l'heure, a occasionné quelques écrits satiriques.
 
Il y a eu aussi le discours du docteur Guillotin, député du Tiers Etet, qui proposa à l'assemblée une "machine humanitaire", chargée de donner la mort de façon rapide. L'instantanéité de la mort se fait par la chute d'un couperet séparant la tête du tronc. Je ne sais quel avenir aura cette machine qui, pour l'heure, a occasionné quelques écrits satiriques.
 
 
Chère Emilie, comment allons-nous passer ces prochaines semaines, qui sont d'ordinaire des jours de fête? Voici presque un an que nous sommes séparés... Qu'adviendra-t-il de notre amour lors de l'année qui s'annonce? Aurons-nous toujours suffisamment de patience pour fortifier la passion qui nous porta naguère dans les bras l'un de l'autre? Chère, très chère amie, votre présence me manque terriblement, J'aimerais surprendre le bleu franc de votre regard et sentir sur ma joue la douceur de votre main...
 
Chère Emilie, comment allons-nous passer ces prochaines semaines, qui sont d'ordinaire des jours de fête? Voici presque un an que nous sommes séparés... Qu'adviendra-t-il de notre amour lors de l'année qui s'annonce? Aurons-nous toujours suffisamment de patience pour fortifier la passion qui nous porta naguère dans les bras l'un de l'autre? Chère, très chère amie, votre présence me manque terriblement, J'aimerais surprendre le bleu franc de votre regard et sentir sur ma joue la douceur de votre main...
 
 
H I FFOL YT'E
 
H I FFOL YT'E
 
 
==EASTBOURNE, LE 25 DECEMBRE 1789==
 
==EASTBOURNE, LE 25 DECEMBRE 1789==
 
Hippolyte adoré,
 
Hippolyte adoré,
 
 
En ce jour de Noël, je pense à vous plus fort encore que d'ordinaire. Je me souviens du dernier Noël que nous passâmes ensemble, de la créche que Lisette avait arrangée avec art, y disposant l'image en cire du divin Enfant, étendu sur la paille. Plus encore, je me souviens des Noëls que, durant mon enfance, je passais au château de Boisvert. Avec quel empressement mon père faisait dresser dans le vestibule un immense sapin, que les domestiques agrémentaient de lanternes, de rubans, de jouets et de friandises! Avec quel émerveillement les enfants du village venaient se joindre à nous pour la
 
En ce jour de Noël, je pense à vous plus fort encore que d'ordinaire. Je me souviens du dernier Noël que nous passâmes ensemble, de la créche que Lisette avait arrangée avec art, y disposant l'image en cire du divin Enfant, étendu sur la paille. Plus encore, je me souviens des Noëls que, durant mon enfance, je passais au château de Boisvert. Avec quel empressement mon père faisait dresser dans le vestibule un immense sapin, que les domestiques agrémentaient de lanternes, de rubans, de jouets et de friandises! Avec quel émerveillement les enfants du village venaient se joindre à nous pour la
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veillée, et partager un goûter mémorable!
 
veillée, et partager un goûter mémorable!
 
 
Hélas, tout ce temps est bien loin! Je vais vivre un triste Noël et mes pensées seront mélancoliques. Néanmoins, au milieu de cette tristesse, il y a pour moi la joie de me savoir aimée. Je sais que, à Paris, vous pensez aussi à moi et que nos deux coeurs sont tendrement réunis.
 
Hélas, tout ce temps est bien loin! Je vais vivre un triste Noël et mes pensées seront mélancoliques. Néanmoins, au milieu de cette tristesse, il y a pour moi la joie de me savoir aimée. Je sais que, à Paris, vous pensez aussi à moi et que nos deux coeurs sont tendrement réunis.
 
 
Je suis à vous, passionnément,
 
Je suis à vous, passionnément,
 
 
EMII Il
 
EMII Il
 
 
==PARIS, LE ler JANVIER 1790==
 
==PARIS, LE ler JANVIER 1790==
 
Ma bien-aimée,
 
Ma bien-aimée,
 
 
J'aimerais tant que cette année fût celle de nos retrouvailles! Quelles étrennes pourrions-nous nous offrir, si ce n'est la promesse d'un amour toujours grandissant malgré l'éloignement?
 
J'aimerais tant que cette année fût celle de nos retrouvailles! Quelles étrennes pourrions-nous nous offrir, si ce n'est la promesse d'un amour toujours grandissant malgré l'éloignement?
 
 
A Paris, depuis la nationalisation des biens du Clergé, proposée par Talleyrand et votée par l'assemblée le 2 Novembre, la vie politique en France connaît une accalmie. Dans notre quartier, nous avons cependant des difficultés d'approvisionnement. Nous en sommes réduits à acheter des pommes de terre, ce "tubercule" dont le pharmacien Parmentier vante les mérites. Nous mangeons du hareng et de la morue séchée. A part cela, nous ne trouvons à Paris que des miches de pain noir. Quand nos amis ont l'occasion de quitter Paris pour se rendre à la campagne, ils nous ramènent des oeufs, des laitages, et surtout du bon pain blanc qui nous manque tant ici. Vous pensez bien quelle doit être la misère des petites gens, si nous-mêmes avons tout juste de quoi manger à notre faim!
 
A Paris, depuis la nationalisation des biens du Clergé, proposée par Talleyrand et votée par l'assemblée le 2 Novembre, la vie politique en France connaît une accalmie. Dans notre quartier, nous avons cependant des difficultés d'approvisionnement. Nous en sommes réduits à acheter des pommes de terre, ce "tubercule" dont le pharmacien Parmentier vante les mérites. Nous mangeons du hareng et de la morue séchée. A part cela, nous ne trouvons à Paris que des miches de pain noir. Quand nos amis ont l'occasion de quitter Paris pour se rendre à la campagne, ils nous ramènent des oeufs, des laitages, et surtout du bon pain blanc qui nous manque tant ici. Vous pensez bien quelle doit être la misère des petites gens, si nous-mêmes avons tout juste de quoi manger à notre faim!
 
 
Chère Emilie, quel tourment que l'absence! Je crains qu'il ne nous faille être courageux pour affronter les jours et les mois à venir. Je vous conjure de vous armer de patience. Que peut-il nous arriver, puisque notre amour nous protège? Je vous serre bien tendrement dans mes bras,
 
Chère Emilie, quel tourment que l'absence! Je crains qu'il ne nous faille être courageux pour affronter les jours et les mois à venir. Je vous conjure de vous armer de patience. Que peut-il nous arriver, puisque notre amour nous protège? Je vous serre bien tendrement dans mes bras,
 
 
H I F'Fc i YT E'
 
H I F'Fc i YT E'
 
 
==EASTBOURNE, LE 15 JANVIER 1790==
 
==EASTBOURNE, LE 15 JANVIER 1790==
 
Mon cher Hippolyte,
 
Mon cher Hippolyte,
 
 
En Angleterre, il court des bruits que nous ne pouvons pas ignorer. Les émigrés sont déjà nombreux et l'Assemblée craint qu'ils ne se liguent et ne
 
En Angleterre, il court des bruits que nous ne pouvons pas ignorer. Les émigrés sont déjà nombreux et l'Assemblée craint qu'ils ne se liguent et ne
forment une armée qui viendrait sauver le roi et reprendre le pouvoir, depuis
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Je forment une armée qui viendrait sauver le roi et reprendre le pouvoir, depuis
l'extérieur. Tout cela est-il vrai? Pensez-vous que les émigrés soient si
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nombreux qu'on le dit?
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t' nombreux qu'on le dit?
 
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on J'ai lu récemment un rappel des dernières décisions de l'Assemblée. Le
J'ai lu récemment un rappel des dernières décisions de l'Assemblée. Le
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re veto suspensif pour la durée de deux législatures a été accordé au roi, et la es el
veto suspensif pour la durée de deux législatures a été accordé au roi, et la es el
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e Constitution, encore sous forme de projet, affirme que "le gouvernement français est monarchique". Mais notre roi a-t-il vraiment accepté, en son for intérieur, de devenir "Louis, par la grâce de Dieu et la Constitution de
e Constitution, encore sous forme de projet, affirme que "le gouvernement français est monarchique".  
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Mais notre roi a-t-il vraiment accepté, en son for intérieur, de devenir "Louis, par la grâce de Dieu et la Constitution de
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1'Etat, roi des Français" au lieu de "Roi de France et de Navarre"?
 
1'Etat, roi des Français" au lieu de "Roi de France et de Navarre"?
 
 
Cher Hippolyte, comment vous dire l'angoisse qui me prend certain soir de savoir qu'il se prépare en France quelque événement politique dont la hardiesse me fait peur par avance! Comme j'aimerais être auprès de vous dans ces moments difficiles! Je vous embrasse,
 
Cher Hippolyte, comment vous dire l'angoisse qui me prend certain soir de savoir qu'il se prépare en France quelque événement politique dont la hardiesse me fait peur par avance! Comme j'aimerais être auprès de vous dans ces moments difficiles! Je vous embrasse,
 
 
EMIL ILS
 
EMIL ILS
 
 
==PARIS, LE 2 FEVRIER 1790==
 
==PARIS, LE 2 FEVRIER 1790==
 
Chère Emilie,
 
Chère Emilie,
 
 
En tant que membre du club des Jacobins, et parce que je proposais à l'Assemblée mes services comme secrétaire, je me suis vu confier une nouvelle charge. Il faut d'abord vous dire que, le 15 janvier dernier, l'Assemblée a pris la décision de diviser la France en quatre-vingt-trois départements. La plupart de ces départements correspondent aux limites des gouvernements. Le choix du chef-lieu a été souvent difficile. Par exemple, il y a rivalité entre Aix et Marseille, entre La Rochelle et Saintes. Or, le but de l'assemblée est d'instituer l'union des départements du royaume ainsi que leur égalité. Pour cela, elle a considéré comme nécessaire d'envoyer des émissaires dans toute la France, afin qu'ils informent les municipalités des décisions prises concernant les départements. C'est ainsi que je suis émissaire dans le département du Doubs. Je dois, là-bas, aider les maires des communes à l'appplication des lois. En chemin, je passerai par l'Ile de France et la Bourgogne. Je ne sais combien de temps me prendra ce périple, ni quelles difficultés je rencontrerai. Dans tous les cas, je pense faire mon possible pour me conduire en bon patriote.
 
En tant que membre du club des Jacobins, et parce que je proposais à l'Assemblée mes services comme secrétaire, je me suis vu confier une nouvelle charge. Il faut d'abord vous dire que, le 15 janvier dernier, l'Assemblée a pris la décision de diviser la France en quatre-vingt-trois départements. La plupart de ces départements correspondent aux limites des gouvernements. Le choix du chef-lieu a été souvent difficile. Par exemple, il y a rivalité entre Aix et Marseille, entre La Rochelle et Saintes. Or, le but de l'assemblée est d'instituer l'union des départements du royaume ainsi que leur égalité. Pour cela, elle a considéré comme nécessaire d'envoyer des émissaires dans toute la France, afin qu'ils informent les municipalités des décisions prises concernant les départements. C'est ainsi que je suis émissaire dans le département du Doubs. Je dois, là-bas, aider les maires des communes à l'appplication des lois. En chemin, je passerai par l'Ile de France et la Bourgogne. Je ne sais combien de temps me prendra ce périple, ni quelles difficultés je rencontrerai. Dans tous les cas, je pense faire mon possible pour me conduire en bon patriote.
 
 
A ce propos, savez-vous que j'ai dû troquer ma culotte de soie et mon habit de velours contre des habits de "patriote": pantalon de toile à rayures rouges, frac plus court, agrémenté de larges revers sur lesquels sont étalées les couleurs de la Nation. Je porte aussi un chapeau rond, orné de la cocarde bleue, blanche et rouge, d'après l'exemple que donna il y a quelques mois Camille Desmoulins. Sans doute ne me reconnaîtriez-vous pas sous cet accoutrement que tout le monde porte ici. Les femmes arborent quant à elles une robe blanche à rayures rouges, et portent une cocarde tricolore sur leurs bonnets...
 
A ce propos, savez-vous que j'ai dû troquer ma culotte de soie et mon habit de velours contre des habits de "patriote": pantalon de toile à rayures rouges, frac plus court, agrémenté de larges revers sur lesquels sont étalées les couleurs de la Nation. Je porte aussi un chapeau rond, orné de la cocarde bleue, blanche et rouge, d'après l'exemple que donna il y a quelques mois Camille Desmoulins. Sans doute ne me reconnaîtriez-vous pas sous cet accoutrement que tout le monde porte ici. Les femmes arborent quant à elles une robe blanche à rayures rouges, et portent une cocarde tricolore sur leurs bonnets...
  
 
Na tendre amie, je pars dès demain. J'espère pouvoir vous envoyer de temps en temps un petit mot. Je ne saurais trop vous conseiller de cesser de m'écrire durant quelques mois. S'il arrivait que votre lettre s'égarât et tombât entre de mauvaises mains, je ne me le pardonnerais pas. Nos vies seraient en danger. Vous savez que les émigrés sont mal considérés, et que l'on regarde d'un mauvais oeil ceux qui correspondent avec eux. Rassurez-vous: je sais que votre silence ne sera pas le signe d'un manque d'amour, mais la preuve de votre sagesse et de votre patience.
 
Na tendre amie, je pars dès demain. J'espère pouvoir vous envoyer de temps en temps un petit mot. Je ne saurais trop vous conseiller de cesser de m'écrire durant quelques mois. S'il arrivait que votre lettre s'égarât et tombât entre de mauvaises mains, je ne me le pardonnerais pas. Nos vies seraient en danger. Vous savez que les émigrés sont mal considérés, et que l'on regarde d'un mauvais oeil ceux qui correspondent avec eux. Rassurez-vous: je sais que votre silence ne sera pas le signe d'un manque d'amour, mais la preuve de votre sagesse et de votre patience.
 
Jamais vous ne m'avez été aussi chère, et, quelque chagrin que j'éprouve d'être séparé de vous, il n'y a pas de jour où je ne me félicite de vous savoir en sécurité en Angleterre.
 
Jamais vous ne m'avez été aussi chère, et, quelque chagrin que j'éprouve d'être séparé de vous, il n'y a pas de jour où je ne me félicite de vous savoir en sécurité en Angleterre.
 
 
Bien à vous, pour toujours,
 
Bien à vous, pour toujours,
 
 
III:PPc I YTJE
 
III:PPc I YTJE
 
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==BESANCON, LE 7 MARS 1790==
 
==BESANCON, LE 7 MARS 1790==
 
Chère Emilie,
 
Chère Emilie,

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