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Modification de Villes/Montluçon/sciences/le grand siècle

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===Introduction===
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Introduction
  
Le XVIIème siècle restera, dans toutes les mémoires, celui que l'on a appelé le GRAND SIECLE, En 1600, Henri IV régnait depuis onze ans sur la France. Il avait signé en 1598 l'édit de Nantes, apaisant les conflits religieux. Il fut assassiné en 1610. Cette mort subite, ajoutée à la bonhomie et à la générosité naturelle du Béarnais en fit pour la postérité l'un des rois français les plus populaires.  
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Le XVIIème siècle restera, dans toutes les mémoires, celui que l'on a appelé le GRAND SIEGLE, En 1600, Henri IV régnait depuis onze ans sur la France. Il avait signé en 1598 l'édit de Nantes, apaisant les conflits religieux. Il fut assassiné en 1610. Cette mort subite, ajoutée à la bonhomie et à la générosité naturelle du Béarnais en fit pour la postérité l'un des rois français les plus populaires. Après lui, le XVIIème siècle se poursuivit par la régence de Marie de Médicis, son fils Louis XIII étant encore trop jeune. Quand celui-ci commença véritablement son règne, il fut aidé par Richelieu qui prit rapidement de l'ascendant. Richelieu voulait établir la monarchie absolue: il combattit à l'extérieur la maison d'Autriche et à l'intérieur les protestants. Il fonda l'Académie française en 1635 et fit bâtir le Palais-Cardinal, futur Palais-Royal. Dans sa politique, Louis XIII le soutint toujours, malgré les complots et cabales noués autour d'eux par sa mère, sa femme Anne d'Autriche ou son frère Gaston d'Orléans. L'absence de dauphin favorisait d'ailleurs cette atmosphère de trouble et de suspicion. On comprend alors pourquoi la naissance du futur Louis XIV, le 5 Septembre 1638, fut accueillie dans tout le pays avec une joie incommensurable. Quand son père Louis XIII mourut en 1643, un an après le cardinal de Richelieu, la régence revint à Anne d'Autriche, mère de Louis XIV et de son jeune frère Philippe. Elle choisit pour ministre Mazarin, qui était le parrain de Louis XIV, et à qui Richelieu avait donné le titre de cardinal. La régence fut marquée par des événements militaires (victoire française contre les Espagnols en 1643 à Rocrol), et diplomatiques (Traité de Westphalie qui mit fin à la guerre de Trente ans en 1648, garantissant à la France la possession des trois évêchés Metz Toul Verdun). C'est durant la régence que sévirent sur la France les troubles de la Fronde, qui devait rester cruellement gravée dans la mémoire du
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ieune roi. Celui-c' fut déclaré majeur à 13 ans co le veut la tradition française depuis (Charles V. Il fut sacré roi à 16 ans, mais son véritable règne ne débuta qu'en 1661, date de la mort de Mazarin. Commença alors l'un des plus grands règnes de l'Histoire de France, durant lequel tout serait placé sous le signe de la grandeur et subordonné au bon plaisir de celui qui allait devenir le Roi-Soleil.
  
Après lui, le XVIIème siècle se poursuivit par la régence de Marie de Médicis, son fils Louis XIII étant encore trop jeune. Quand celui-ci commença véritablement son règne, il fut aidé par Richelieu qui prit rapidement de l'ascendant. Richelieu voulait établir la monarchie absolue: il combattit à l'extérieur la maison d'Autriche et à l'intérieur les protestants. Il fonda l'Académie française en 1635 et fit bâtir le Palais-Cardinal, futur Palais-Royal. Dans sa politique, Louis XIII le soutint toujours, malgré les complots et cabales noués autour d'eux par sa mère, sa femme Anne d'Autriche ou son frère Gaston d'Orléans. L'absence de dauphin favorisait d'ailleurs cette atmosphère de trouble et de suspicion.  
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NB: 1) Les mots en gras sont susceptibles de faire l'objet d'une question au cours du jeu.
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2> Seuls les noms des personnages historiques figurent dans le lexique.
  
On comprend alors pourquoi la naissance du futur Louis XIV, le 5 Septembre 1638, fut accueillie dans tout le pays avec une joie incommensurable. Quand son père Louis XIII mourut en 1643, un an après le cardinal de Richelieu, la régence revint à Anne d'Autriche, mère de Louis XIV et de son jeune frère Philippe. Elle choisit pour ministre Mazarin, qui était le parrain de Louis XIV, et à qui Richelieu avait donné le titre de cardinal. La régence fut marquée par des événements militaires (victoire française contre les Espagnols en 1643 à Rocrol), et diplomatiques (Traité de Westphalie qui mit fin à la guerre de Trente ans en 1648, garantissant à la France la possession des trois évêchés Metz Toul Verdun).
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F'R EJ'ŒIERE EFOQuE 1 38-1 [5î
C'est durant la régence que sévirent sur la France les troubles de la Fronde, qui devait rester cruellement gravée dans la mémoire du
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jeune roi. Celui-ci fut déclaré majeur à 13 ans comme le veut la tradition française depuis Charles V. Il fut sacré roi à 16 ans, mais son véritable règne ne débuta qu'en 1661, date de la mort de Mazarin. Commença alors l'un des plus grands règnes de l'Histoire de France, durant lequel tout serait placé sous le signe de la grandeur et subordonné au bon plaisir de celui qui allait devenir le Roi-Soleil.
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== Première époque ==
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Légère, tournoyante, Marie s'affaire dans sa chambre, virevolte de tous côtés, émue comme une jeune fille à la veille de son premier bal. Pour elle qui vient d'avoir vingt-trois ans, la vie ne fait que commencer. Ce soir est précisément celui de sa première sortie dans le monde depuis son veuvage. C'est pourquoi elle veut être belle et oublier sa retraite loin des divertissements. Dans quelques instants, sa femme de chambre Francinette viendra l'aider à se préparer. Marie calme son impatience en regardant ses longs cheveux blonds qui ne sont pas encore coiffés; pour en mesurer la splendeur et la grâce naturelle, elle les admire dans la lourde et majestueuse glace à fronton, ornée de motifs de bronze représentant des feuilles d'acanthe entrelacées, qui occupe une place de choix au-dessus de sa commode. Marie rêvasse un moment et sourit en se souvenant que cette glace lui a été offerte par sa marraine, la marquise de Broussac qui, à quarante ans et malgré ses huit maternités est encore si belle que de nombreux courtisans viennent lui rendre quotidiennement leurs hommages. Dieu! comme Marie aimerait ressembler à sa marraine à qui tout semble avoir réussi! Marie est prête, elle aussi, à se battre pour trouver le meilleur en tout, et connaître le bonheur.
 
Légère, tournoyante, Marie s'affaire dans sa chambre, virevolte de tous côtés, émue comme une jeune fille à la veille de son premier bal. Pour elle qui vient d'avoir vingt-trois ans, la vie ne fait que commencer. Ce soir est précisément celui de sa première sortie dans le monde depuis son veuvage. C'est pourquoi elle veut être belle et oublier sa retraite loin des divertissements. Dans quelques instants, sa femme de chambre Francinette viendra l'aider à se préparer. Marie calme son impatience en regardant ses longs cheveux blonds qui ne sont pas encore coiffés; pour en mesurer la splendeur et la grâce naturelle, elle les admire dans la lourde et majestueuse glace à fronton, ornée de motifs de bronze représentant des feuilles d'acanthe entrelacées, qui occupe une place de choix au-dessus de sa commode. Marie rêvasse un moment et sourit en se souvenant que cette glace lui a été offerte par sa marraine, la marquise de Broussac qui, à quarante ans et malgré ses huit maternités est encore si belle que de nombreux courtisans viennent lui rendre quotidiennement leurs hommages. Dieu! comme Marie aimerait ressembler à sa marraine à qui tout semble avoir réussi! Marie est prête, elle aussi, à se battre pour trouver le meilleur en tout, et connaître le bonheur.
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dans le train de dépenses de la maison royale, n'en ayant confié
 
dans le train de dépenses de la maison royale, n'en ayant confié
 
l'administration qu'à des personnes qui lui étaient entièrement dévouées.
 
l'administration qu'à des personnes qui lui étaient entièrement dévouées.
 
 
Et puis, la même année, la reine Marie-Thérèse avait rendu l'âme: elle était morte prématurément, à quarante-cinq ans, le 30 juillet. Marie se souvient bien de cette date, car ce fut l'un des jours les plus tristes qu'il lui fut donné de vivre. Cette reine qui avait su s'effacer devant la majestueuse grandeur de son royal époux et qui avait tout supporté de lui, était morte des suites d'un abcès bénin, maladroitement soigné par des médecins qui n'acceptaient comme seuls remèdes que les purges et les saignées. Le roi, ce jour-là, avait été sincèrement désemparé; il avait prononcé ces mots, juste après avoir appris la nouvelle de la mort de sa femme; "C'est le premier chagrin qu'elle m'ait causé".
 
Et puis, la même année, la reine Marie-Thérèse avait rendu l'âme: elle était morte prématurément, à quarante-cinq ans, le 30 juillet. Marie se souvient bien de cette date, car ce fut l'un des jours les plus tristes qu'il lui fut donné de vivre. Cette reine qui avait su s'effacer devant la majestueuse grandeur de son royal époux et qui avait tout supporté de lui, était morte des suites d'un abcès bénin, maladroitement soigné par des médecins qui n'acceptaient comme seuls remèdes que les purges et les saignées. Le roi, ce jour-là, avait été sincèrement désemparé; il avait prononcé ces mots, juste après avoir appris la nouvelle de la mort de sa femme; "C'est le premier chagrin qu'elle m'ait causé".
 
 
Ainsi, valait-il mieux être ambitieuse et intrigante plutôt que douce et aimante pour que le roi daigne s'intéresser à votre personne. Marie avait compris dès les premiers jours qu'elle avait passés à la Cour que seule l'ambition comptait et que, dans ce monde clos et soumis à des règles strictes, il fallait savoir profiter de toutes les situations. Après la mort de Marie-Thérèse, elle avait accepté une charge que, cinq ans auparavant, elle avait refusé par délicatesse pour la reine. Elle était devenue gouvernante des enfants naturels du roi et de Madame de Montespan. Une telle charge était un emploi qui, de par sa nature même, semblait bafouer les bonnes moeurs, mais il fallait se rendre à l'évidence: les liaisons amoureuses du roi n'avaient jamais été un secret pour personne. Madame de Montespan était restée sa favorite durant une dizaine d'années; elle était maintenant supplantée dans le coeur royal par Françoise d'Aubigné, devenue Marquise de Maintenon en 1673. Celle-ci était depuis de nombreuses années la gouvernante de la première fille naturelle de Louis XIV et Madame de Montespan, Mademoiselle de Nantes. Puis sa charge s'était accrue au fur et à mesure que les naissances se succédaient. L'enfant dont Madame de Maintenon s'occupait le plus, et qui devint vite son préféré, fut Louis-Auguste, duc du Maine, ce même jeune garçon dont Marie eut la garde un jour de l'année 1678. Madame de Maintenon appelait son protégé "mon cher enfant" ou "mon petit prince", et elle le considérait comme son fils. A dix ans, il avait eu pour gouverneur Monsieur de Montchevreuil, nommé par le roi sur les conseils de Madame de Maintenon. De cette façon, celle-ci continuait à exercer sa tutelle sur le jeune duc qui lui donnait toute satisfaction. Il passait de longues heures à ses côtés, et elle causait avec lui, essayant de lui inculquer le culte du roi son père. Marie, quant à elle, était gouvernante de la jeune duchesse de Chartres, née en 1677 et du petit comte de Toulouse, son cadet d'un an. C'était de beaux enfants aux boucles blondes, et aux grands yeux interrogatifs. Marie, qui ne savait pas grand chose de la charge de gouvernante, était allée voir Madame de Maintenon, qui aimait parler de l'art d'éduquer les enfants. Elle avait passé sa vie à
 
Ainsi, valait-il mieux être ambitieuse et intrigante plutôt que douce et aimante pour que le roi daigne s'intéresser à votre personne. Marie avait compris dès les premiers jours qu'elle avait passés à la Cour que seule l'ambition comptait et que, dans ce monde clos et soumis à des règles strictes, il fallait savoir profiter de toutes les situations. Après la mort de Marie-Thérèse, elle avait accepté une charge que, cinq ans auparavant, elle avait refusé par délicatesse pour la reine. Elle était devenue gouvernante des enfants naturels du roi et de Madame de Montespan. Une telle charge était un emploi qui, de par sa nature même, semblait bafouer les bonnes moeurs, mais il fallait se rendre à l'évidence: les liaisons amoureuses du roi n'avaient jamais été un secret pour personne. Madame de Montespan était restée sa favorite durant une dizaine d'années; elle était maintenant supplantée dans le coeur royal par Françoise d'Aubigné, devenue Marquise de Maintenon en 1673. Celle-ci était depuis de nombreuses années la gouvernante de la première fille naturelle de Louis XIV et Madame de Montespan, Mademoiselle de Nantes. Puis sa charge s'était accrue au fur et à mesure que les naissances se succédaient. L'enfant dont Madame de Maintenon s'occupait le plus, et qui devint vite son préféré, fut Louis-Auguste, duc du Maine, ce même jeune garçon dont Marie eut la garde un jour de l'année 1678. Madame de Maintenon appelait son protégé "mon cher enfant" ou "mon petit prince", et elle le considérait comme son fils. A dix ans, il avait eu pour gouverneur Monsieur de Montchevreuil, nommé par le roi sur les conseils de Madame de Maintenon. De cette façon, celle-ci continuait à exercer sa tutelle sur le jeune duc qui lui donnait toute satisfaction. Il passait de longues heures à ses côtés, et elle causait avec lui, essayant de lui inculquer le culte du roi son père. Marie, quant à elle, était gouvernante de la jeune duchesse de Chartres, née en 1677 et du petit comte de Toulouse, son cadet d'un an. C'était de beaux enfants aux boucles blondes, et aux grands yeux interrogatifs. Marie, qui ne savait pas grand chose de la charge de gouvernante, était allée voir Madame de Maintenon, qui aimait parler de l'art d'éduquer les enfants. Elle avait passé sa vie à
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s'occuper des enfants des autres et, eri 1886, elle avait fondé une maison d'éducation du nom de Saint-Gyr. Madame de Maintenon confia à Marie que l'éducation exigeait une longue patience, et qu'il convenait d'observer scrupuleusement son élève, pour suivre son humeur et ses capacités naturelles.
 
s'occuper des enfants des autres et, eri 1886, elle avait fondé une maison d'éducation du nom de Saint-Gyr. Madame de Maintenon confia à Marie que l'éducation exigeait une longue patience, et qu'il convenait d'observer scrupuleusement son élève, pour suivre son humeur et ses capacités naturelles.
 
 
La marquise, plus tard, avait approuvé ce que faisait Fenelon: ce prélat avait professé des idées pédagogiques nouvelles par la tolérance qu'elles préconisaient. Lorsqu'il était devenu le précepteur du duc de Bourgogne, fils aîné du Grand Dauphin, il avait composé pour lui des Fables en prose sur des sujets édifiants. I1 avait aussi écrit "Les Aventures de Télémaque", récit qui retrace l'histoire du fils d'Ulysse, parti pour retrouver son père au cours d'un périlleux voyage. Fénelon voulait, par ce livre, non seulement initier son élève aux textes de l'antiquité, mais aussi lui apprendre son futur métier de souverain. Détestant autant la guerre que l'ambition, Fénelon enseignait qu'il existe plusieurs types d'autorité, qu'elle soit magnanime ou hypocrite, abjecte ou imprudente. C'était une leçon pour le jeune duc qui, d'un tempérament naturellement porté à la cruauté, fut ainsi assagi par la patience de Fénelon.
 
La marquise, plus tard, avait approuvé ce que faisait Fenelon: ce prélat avait professé des idées pédagogiques nouvelles par la tolérance qu'elles préconisaient. Lorsqu'il était devenu le précepteur du duc de Bourgogne, fils aîné du Grand Dauphin, il avait composé pour lui des Fables en prose sur des sujets édifiants. I1 avait aussi écrit "Les Aventures de Télémaque", récit qui retrace l'histoire du fils d'Ulysse, parti pour retrouver son père au cours d'un périlleux voyage. Fénelon voulait, par ce livre, non seulement initier son élève aux textes de l'antiquité, mais aussi lui apprendre son futur métier de souverain. Détestant autant la guerre que l'ambition, Fénelon enseignait qu'il existe plusieurs types d'autorité, qu'elle soit magnanime ou hypocrite, abjecte ou imprudente. C'était une leçon pour le jeune duc qui, d'un tempérament naturellement porté à la cruauté, fut ainsi assagi par la patience de Fénelon.
 
 
Tenant compte des conseils de Madame de Maintenon, Marie était devenue l'amie et la compagne de jeu de la princesse de Chartres et du comte de Toulouse. Elle les laissait jouer avec leurs petis canons d'argent et leurs soldats de plomb, ou bien avec leurs automates musiciens. Sa tâche principale consistait à concilier l'amusement et les études. Il faut dire que les enfants avaient de nombreuses occupations. L'équitation, la danse, l'escrime, complétaient leur formation qui devait leur permettre d'acquérir un savoir étendu et précoce. A dix ans, il est coutume qu'un enfant sache tout Homère par coeur! Les journées passaient vite avec des leçons entrecoupées de parties de cartes ou de dès, et des promenades dans les jardins, vers la ménagerie, la volière ou le potager. Les enfants aimaient apprendre en s'amusant, et c'était une joie pour Marie de leur faire découvrir, avec l'aide des jardiniers, le nom des fleurs et des arbustes qui poussaient abondamment dans les superbes jardins de Versailles.
 
Tenant compte des conseils de Madame de Maintenon, Marie était devenue l'amie et la compagne de jeu de la princesse de Chartres et du comte de Toulouse. Elle les laissait jouer avec leurs petis canons d'argent et leurs soldats de plomb, ou bien avec leurs automates musiciens. Sa tâche principale consistait à concilier l'amusement et les études. Il faut dire que les enfants avaient de nombreuses occupations. L'équitation, la danse, l'escrime, complétaient leur formation qui devait leur permettre d'acquérir un savoir étendu et précoce. A dix ans, il est coutume qu'un enfant sache tout Homère par coeur! Les journées passaient vite avec des leçons entrecoupées de parties de cartes ou de dès, et des promenades dans les jardins, vers la ménagerie, la volière ou le potager. Les enfants aimaient apprendre en s'amusant, et c'était une joie pour Marie de leur faire découvrir, avec l'aide des jardiniers, le nom des fleurs et des arbustes qui poussaient abondamment dans les superbes jardins de Versailles.
 
 
Il faut dire que, depuis 1682, la Cour s'était installée définitivement à Versailles. Le petit pavillon de chasse construit par Louis XIII était devenu, grâce à de grands travaux qui avaient duré plus de vingt ans, un gigantesque palais entouré d'un parc aux dimensions imposantes. C'est en 1661 que l'architecte Louis Le Vau avait été chargé par Louis XIV d'en commencer la construction. Premier architecte du roi, il avait déjà montré son talent en construisant de nombreux hôtels pour les gens des finances dans l'île Saint-Louis. C'est également lui qui avait fait construire le Collège des Quatre-Nations, dont les majestueux bâtiments surplombent la rive droite de la Seine. Mais, surtout, c'était lui l'architecte du château de Fouquet à Vaux-le-Vicomte, château dont Louis XIV avait envié le faste et l'agencement. Dès la disgrâce de Fouquet, le roi avait engagé l'équipe qui avait travaillé a Vaux: il y avait là l'architecte Louis Le Vau, le décorateur Charles Le Brun et le jardinier André Le Nôtre qui dessina plus le parc de Versailles.
 
Il faut dire que, depuis 1682, la Cour s'était installée définitivement à Versailles. Le petit pavillon de chasse construit par Louis XIII était devenu, grâce à de grands travaux qui avaient duré plus de vingt ans, un gigantesque palais entouré d'un parc aux dimensions imposantes. C'est en 1661 que l'architecte Louis Le Vau avait été chargé par Louis XIV d'en commencer la construction. Premier architecte du roi, il avait déjà montré son talent en construisant de nombreux hôtels pour les gens des finances dans l'île Saint-Louis. C'est également lui qui avait fait construire le Collège des Quatre-Nations, dont les majestueux bâtiments surplombent la rive droite de la Seine. Mais, surtout, c'était lui l'architecte du château de Fouquet à Vaux-le-Vicomte, château dont Louis XIV avait envié le faste et l'agencement. Dès la disgrâce de Fouquet, le roi avait engagé l'équipe qui avait travaillé a Vaux: il y avait là l'architecte Louis Le Vau, le décorateur Charles Le Brun et le jardinier André Le Nôtre qui dessina plus le parc de Versailles.
 
 
Selon le désir du roi, Le Vau avait gardé autour de la cour de marbre l'ancien bâtiment qu'il avait surélevé et agrémenté de balcons et de bustes. L'ensemble était fait de brique rose, d'ardoise bleue et de pierre blanche. Il avait fait édifier, à partir du corps central, deux bâtiments parallèles reliés par un portique orné de statues. Face au parc, il avait construit une terrasse dallée de marbre avec un jet d'eau.
 
Selon le désir du roi, Le Vau avait gardé autour de la cour de marbre l'ancien bâtiment qu'il avait surélevé et agrémenté de balcons et de bustes. L'ensemble était fait de brique rose, d'ardoise bleue et de pierre blanche. Il avait fait édifier, à partir du corps central, deux bâtiments parallèles reliés par un portique orné de statues. Face au parc, il avait construit une terrasse dallée de marbre avec un jet d'eau.
 
 
Marie aime l'entrée fastueuse du château. La première fois qu'elle en a franchi la grande grille peinte en bleu et or, elle était accompagnée de nombreux visiteurs. En effet, depuis longtemps, un service plus ou moins régulier de voitures publiques a été improvisé entre Paris et Versailles. Les trajets se font dans des carrosses très incommodes ou la chaleur est insupportable en été et o l'on est entassé les uns sur les autres. Quelques visiteurs sont munis d'une "Explication de ce qu'il y a de plus important à voir dans la Maison royale de Versailles". On entre dans le palais en traversant la cour des ministres, bordée de deux gros pavillons; on franchit ensuite la seconde grille et on pénètre dans la cour royale, séparée de la cour de marbre par trois marches. C'est la cour de marbre dans laquelle Marie aime le mieux à se tenir: il y a là une magnifique fontaine, des volières, des orangers en nombre impressionnant, et, dans les angles, de grands jets d'eau
 
Marie aime l'entrée fastueuse du château. La première fois qu'elle en a franchi la grande grille peinte en bleu et or, elle était accompagnée de nombreux visiteurs. En effet, depuis longtemps, un service plus ou moins régulier de voitures publiques a été improvisé entre Paris et Versailles. Les trajets se font dans des carrosses très incommodes ou la chaleur est insupportable en été et o l'on est entassé les uns sur les autres. Quelques visiteurs sont munis d'une "Explication de ce qu'il y a de plus important à voir dans la Maison royale de Versailles". On entre dans le palais en traversant la cour des ministres, bordée de deux gros pavillons; on franchit ensuite la seconde grille et on pénètre dans la cour royale, séparée de la cour de marbre par trois marches. C'est la cour de marbre dans laquelle Marie aime le mieux à se tenir: il y a là une magnifique fontaine, des volières, des orangers en nombre impressionnant, et, dans les angles, de grands jets d'eau
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sortant de la gueule de tritons sculptés.
 
sortant de la gueule de tritons sculptés.
 
 
L'oeuvre de Le Vau n'étant pas achevée à sa mort, c'est un de ses élèves qui avait repris l'exécution des plans dressés par son maître. Louis XIV avait suivi de près l'état des travaux, et s'était installé pour cela au Grand Trianon, petit château construit à proximité pour permettre au roi de diriger la construction du palais. Versailles achevé, Louis XIV s'était d'ailleurs lassé de ce Trianon et avait chargé l'architecte Jules Hardouin Mansart d'élever à sa place un veritable palais, édifice sans étage couvert d'une toiture à l'italienne tel qu'il est encore en cette fin du XVIIeme siècle.
 
L'oeuvre de Le Vau n'étant pas achevée à sa mort, c'est un de ses élèves qui avait repris l'exécution des plans dressés par son maître. Louis XIV avait suivi de près l'état des travaux, et s'était installé pour cela au Grand Trianon, petit château construit à proximité pour permettre au roi de diriger la construction du palais. Versailles achevé, Louis XIV s'était d'ailleurs lassé de ce Trianon et avait chargé l'architecte Jules Hardouin Mansart d'élever à sa place un veritable palais, édifice sans étage couvert d'une toiture à l'italienne tel qu'il est encore en cette fin du XVIIeme siècle.
 
 
En 1678, Louis XIV avait fait appel à ce même Nansart pour un agrandissement du château de Versailles. Il avait alors édifié les deux ailes du Midi et du Nord et réalisé la longue façade rectiligne du palais, en triplant la longueur par les ailes. Il avait complété cet ensemble par les ailes des Ministres, le Grand Commun, les deux Ecuries, la nouvelle Orangerie et les escaliers des Cent marches. En 1682, trente six mille ouvriers travaillaient à Versailles. Marie a ainsi vu, depuis qu'elle y demeure, de nombreux changements. Mansart avait supprimé la fameuse terrasse, qui était agréable en été mais bien trop froide en hiver. Il avait réuni les deux pavillons par une longue galerie d'apparat qui possède dix-sept baies cintrées ouvrant sur le parc et répondant à dix-sept grands panneaux de glaces. Dans cette Galerie des Glaces, les courtisans, depuis vingt ans, viennent deviser entre eux poliment, attendant le passage du roi ou l'heure d'une audience ou d'une messe. Marie n'est pas à l'aise dans cette grande salle, trop vaste, située entre deux salons. A l'extrémité nord, s'ouvre le salon de la Guerre et au sud le salon de la Paix, richement décorés, sous la direction de Charles Le Brun. Les murs en sont revêtus de marbres de couleur avec des ornements de bronze doré. Des masques et des guirlandes, figurant les quatre Saisons, surmontent les portes. Une grande sculpture en plâtre, due à Antoine Coysevox, représente Louis XIV à cheval sur un champ de bataille, entre deux esclaves en stuc bronzé. Des fenêtres de la Galerie des Glaces, on aperçoit l'ensemble du parc, et l'on reconnaît au centre le tapis vert et le bassin d'Apollon, bordés de part et d'autre de deux allées menant au Grand Canal dont la branche principale se perd dans le lointain.
 
En 1678, Louis XIV avait fait appel à ce même Nansart pour un agrandissement du château de Versailles. Il avait alors édifié les deux ailes du Midi et du Nord et réalisé la longue façade rectiligne du palais, en triplant la longueur par les ailes. Il avait complété cet ensemble par les ailes des Ministres, le Grand Commun, les deux Ecuries, la nouvelle Orangerie et les escaliers des Cent marches. En 1682, trente six mille ouvriers travaillaient à Versailles. Marie a ainsi vu, depuis qu'elle y demeure, de nombreux changements. Mansart avait supprimé la fameuse terrasse, qui était agréable en été mais bien trop froide en hiver. Il avait réuni les deux pavillons par une longue galerie d'apparat qui possède dix-sept baies cintrées ouvrant sur le parc et répondant à dix-sept grands panneaux de glaces. Dans cette Galerie des Glaces, les courtisans, depuis vingt ans, viennent deviser entre eux poliment, attendant le passage du roi ou l'heure d'une audience ou d'une messe. Marie n'est pas à l'aise dans cette grande salle, trop vaste, située entre deux salons. A l'extrémité nord, s'ouvre le salon de la Guerre et au sud le salon de la Paix, richement décorés, sous la direction de Charles Le Brun. Les murs en sont revêtus de marbres de couleur avec des ornements de bronze doré. Des masques et des guirlandes, figurant les quatre Saisons, surmontent les portes. Une grande sculpture en plâtre, due à Antoine Coysevox, représente Louis XIV à cheval sur un champ de bataille, entre deux esclaves en stuc bronzé. Des fenêtres de la Galerie des Glaces, on aperçoit l'ensemble du parc, et l'on reconnaît au centre le tapis vert et le bassin d'Apollon, bordés de part et d'autre de deux allées menant au Grand Canal dont la branche principale se perd dans le lointain.
 
 
Marie va souvent dans le parc; elle marche en direction du midi, sur le côté gauche du château: là, après deux grands parterres, elle descend vers l'Orangerie, construction dont les voûtes soutiennent la terrasse. Puis, au-delà des deux immenses escaliers de cent marches, elle descend vers la pièce d'eau des Suisses, appelée ainsi parce qu'elle fut creusée par des soldats suisses. Marie aime le décor de l'Orangerie qui peut abriter trois mille arbustes, parmi lesquels, outre les orangers, des grenadiers, des myrtes et des lauriers-roses aux effluves suaves. Près du lac des Suisses, qui s'étend sur environ douze hectares, le potager de La Quintinie comprend trente et un petits jardins, consacrés chacun à une culture différente. Marie se promène volontiers à cet endroit car elle s'y sent proche de la nature, loin des attroupements et de la cohue qui règne d'ordinaire à Versailles.
 
Marie va souvent dans le parc; elle marche en direction du midi, sur le côté gauche du château: là, après deux grands parterres, elle descend vers l'Orangerie, construction dont les voûtes soutiennent la terrasse. Puis, au-delà des deux immenses escaliers de cent marches, elle descend vers la pièce d'eau des Suisses, appelée ainsi parce qu'elle fut creusée par des soldats suisses. Marie aime le décor de l'Orangerie qui peut abriter trois mille arbustes, parmi lesquels, outre les orangers, des grenadiers, des myrtes et des lauriers-roses aux effluves suaves. Près du lac des Suisses, qui s'étend sur environ douze hectares, le potager de La Quintinie comprend trente et un petits jardins, consacrés chacun à une culture différente. Marie se promène volontiers à cet endroit car elle s'y sent proche de la nature, loin des attroupements et de la cohue qui règne d'ordinaire à Versailles.
 
 
Dans le somptueux décor du château vit en effet une foule sans cesse grandissante. Alors que les courtisans n'étaient que quelques centaines en 1660, ils sont, depuis vingt ans, près dix mille. Marie consent quelquefois à se promener en compagnie jusqu'au grand canal où les courtisans sont nombreux. Il y a là plusieurs possibilités de distractions: sur le canal évoluent des barques à voiles ou à rames, des chaloupes, des gondoles, plusieurs galères aux pavillons multicolores. Ce matin, profitant d'un beau soleil de fin d'automne, Marie s'embarque sur la frégate en miniature qui tourne régulièrement sur le Grand Canal. Elle a été invitée par le duc de Choisy, qu'elle a connu il y a bien des années. Il lui faisait une cour assidue à laquelle elle n'avait pas cru bon de répondre. Mais, ce jour-là, elle est charmée de le retrouver, parmi tant de courtisans qu'elle salue sans bien les
 
Dans le somptueux décor du château vit en effet une foule sans cesse grandissante. Alors que les courtisans n'étaient que quelques centaines en 1660, ils sont, depuis vingt ans, près dix mille. Marie consent quelquefois à se promener en compagnie jusqu'au grand canal où les courtisans sont nombreux. Il y a là plusieurs possibilités de distractions: sur le canal évoluent des barques à voiles ou à rames, des chaloupes, des gondoles, plusieurs galères aux pavillons multicolores. Ce matin, profitant d'un beau soleil de fin d'automne, Marie s'embarque sur la frégate en miniature qui tourne régulièrement sur le Grand Canal. Elle a été invitée par le duc de Choisy, qu'elle a connu il y a bien des années. Il lui faisait une cour assidue à laquelle elle n'avait pas cru bon de répondre. Mais, ce jour-là, elle est charmée de le retrouver, parmi tant de courtisans qu'elle salue sans bien les
 
connaître. Le duc occupe maintenant une haute fonction, ayant obtenu le poste de président et trésorier général des Finances en Limousin. Marié à une jeune fille de haute noblesse dont la dot s'élevait à plus de cinquante mille écus, il a depuis lors une situation bien établie et nombreux sont ceux qui l'envient. En souvenir de leur passé, Marie et le duc s'entretiennent de choses et d'autres. Elle lui dit qu'elle est depuis de longues années, hantée par le désir de rencontrer le roi, de lui parler et, surtout, de lui plaire.
 
connaître. Le duc occupe maintenant une haute fonction, ayant obtenu le poste de président et trésorier général des Finances en Limousin. Marié à une jeune fille de haute noblesse dont la dot s'élevait à plus de cinquante mille écus, il a depuis lors une situation bien établie et nombreux sont ceux qui l'envient. En souvenir de leur passé, Marie et le duc s'entretiennent de choses et d'autres. Elle lui dit qu'elle est depuis de longues années, hantée par le désir de rencontrer le roi, de lui parler et, surtout, de lui plaire.
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Le duc, impressionné, laisse quelques instants le silence s'établir entre eux. Puis il dit:
 
Le duc, impressionné, laisse quelques instants le silence s'établir entre eux. Puis il dit:
 
"Je conçois que cette situation ne peut plus durer. En vérité, je doute fort que le Masque de Fer soit votre frère. Vous devez cependant dissiper le malentendu, et, pour cela, parler au roi sans plus tarder. Je vous conseillerais d'aller à sa rencontre dans le parc, et d'oser aborder avec lui ce délicat sujet. Lorsque vous serez rassurée sur le sort de votre frère, vous pourrez enfin laissez libre cour à votre coeur et briller dans la compagnie du roi."
 
"Je conçois que cette situation ne peut plus durer. En vérité, je doute fort que le Masque de Fer soit votre frère. Vous devez cependant dissiper le malentendu, et, pour cela, parler au roi sans plus tarder. Je vous conseillerais d'aller à sa rencontre dans le parc, et d'oser aborder avec lui ce délicat sujet. Lorsque vous serez rassurée sur le sort de votre frère, vous pourrez enfin laissez libre cour à votre coeur et briller dans la compagnie du roi."
 
 
Marie, écoutant les conseils du duc, apprécie la finesse de discernement de son ancien ami. Marie le remercie et ils décident tous deux de quitter la frégate à bord de laquelle ils viennent de traverser le Grand Canal. Ils
 
Marie, écoutant les conseils du duc, apprécie la finesse de discernement de son ancien ami. Marie le remercie et ils décident tous deux de quitter la frégate à bord de laquelle ils viennent de traverser le Grand Canal. Ils
débarquent sur la terre ferme et se dirigent vers la Petite Venise, endroit calme et ombragé oi. l'on peut s'asseoir et deviser tranquillement. Ils longent un moment le Grand Canal, en direction du château, puis, laissant sur leur gauche l'allée de Noisy, ils continuent jusqu'à celle de la Petite Venise, Ils trouvent sans difficulté un banc libre, car, en ce milieu de matinée, les courtisans sont peu nombreux.
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débarquent sur la terre ferme et se dirigent vers la Petite Venise, endroit calme et ombragé oi. l'on peut s'asseoir et deviser tranquillement. Ils longent un moment le Grand Canal, en direction du château, puis, laissant sur leur gauche l'allée de Noisy, ils continuent jusqu'à celle de la Petite Venise, Ils trouvent sans difficulté un banc libre, car, en ce milieu de matinée, les courtisans sont peu nombreux,
 
Le duc, avec tact, engage la conversation sur un autre sujet et Marie lui en sait gré. Ils parlent longuement des divertissements donnés à Versailles, et en particulier de Jean Racine, poète qui a quitté ce monde l'année dernière. Marie a beaucoup apprécié la peinture d'un amour passionné dans "Andromaque", et elle se rappelle quelques vers déclamés dans les salons, Elle se sent pareille à Hermione, lorsque celle-ci s'écrie:
 
Le duc, avec tact, engage la conversation sur un autre sujet et Marie lui en sait gré. Ils parlent longuement des divertissements donnés à Versailles, et en particulier de Jean Racine, poète qui a quitté ce monde l'année dernière. Marie a beaucoup apprécié la peinture d'un amour passionné dans "Andromaque", et elle se rappelle quelques vers déclamés dans les salons, Elle se sent pareille à Hermione, lorsque celle-ci s'écrie:
 
<poem>
 
 
"Où suis-je? Qu'ai-je fait? Que dois-je faire encore?
 
"Où suis-je? Qu'ai-je fait? Que dois-je faire encore?
 
Quel transport me saisit? Quel chagrin me dévore?
 
Quel transport me saisit? Quel chagrin me dévore?
 
Errante et sans dessein, je cours dans ce palais.
 
Errante et sans dessein, je cours dans ce palais.
 
Ah! que ne puis-je savoir si j'aime ou si je hais?"
 
Ah! que ne puis-je savoir si j'aime ou si je hais?"
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Marie est effectivement indécise, partagée entre l'amour et la haine: certes, elle aime le Roi-Soleil qui brille de tous ses feux à la Cour, mais ne déteste-t-elle pas sa soif de puissance qui va jusqu'à emprisonner des innocents? Un roi ne sait-il donc jamais s'arrêter?
 
Marie est effectivement indécise, partagée entre l'amour et la haine: certes, elle aime le Roi-Soleil qui brille de tous ses feux à la Cour, mais ne déteste-t-elle pas sa soif de puissance qui va jusqu'à emprisonner des innocents? Un roi ne sait-il donc jamais s'arrêter?
 
Marie en est là dans ses réflexions quand le duc de Choisy évoque _:cèdre", pièce qui fut l'un des sommets de la carrière de Racine. Cette pièce s_uleva de vives protestations de la part de détracteurs, et une cabale se développa à cette occasion. Mais l'incident fut clos car après les excès de la rature humaine dépeints dans "Phèdre", Racine se montra un chrétien repenti. :êjà membre de l'Académie française, c'est alors qu'il fut nommé historiographe du roi. Pendant plus de douze ans, il se consacra à sa nouvelle charge, sans plus produire pour le théâtre. Plus tard Madame de Maintenon lui demanda d'écrire des oeuvres théâtrales qui puissent être jouées devant les ±eux cent cinquante jeunes filles de Saint-Cyr. C'est pour elles que Racine écrivit "Esther" puis "Athalie", deux pièces tirées de l'Ecriture sainte. Les _courtisans accoururent à Saint-Cyr; le roi lui-même dit à Madame de Sévigné après la représentation d"'Esther": "Racine a bien de l'esprit". Un tel :•ugement de la part du roi était un beau compliment. Quelque temps plus tard, Rac ne fut nommé gentilhomme ordinaire du roi, ce qui montre combien il était apprécié. Sur les conseils de Madame de Maintenon, il prépara un plan de réforme et de législation pour soulager la misère du peuple. Cette initiative _e fut malheureusement pas prisée par Louis XIV, qui prononça la disgrâce du
 
Marie en est là dans ses réflexions quand le duc de Choisy évoque _:cèdre", pièce qui fut l'un des sommets de la carrière de Racine. Cette pièce s_uleva de vives protestations de la part de détracteurs, et une cabale se développa à cette occasion. Mais l'incident fut clos car après les excès de la rature humaine dépeints dans "Phèdre", Racine se montra un chrétien repenti. :êjà membre de l'Académie française, c'est alors qu'il fut nommé historiographe du roi. Pendant plus de douze ans, il se consacra à sa nouvelle charge, sans plus produire pour le théâtre. Plus tard Madame de Maintenon lui demanda d'écrire des oeuvres théâtrales qui puissent être jouées devant les ±eux cent cinquante jeunes filles de Saint-Cyr. C'est pour elles que Racine écrivit "Esther" puis "Athalie", deux pièces tirées de l'Ecriture sainte. Les _courtisans accoururent à Saint-Cyr; le roi lui-même dit à Madame de Sévigné après la représentation d"'Esther": "Racine a bien de l'esprit". Un tel :•ugement de la part du roi était un beau compliment. Quelque temps plus tard, Rac ne fut nommé gentilhomme ordinaire du roi, ce qui montre combien il était apprécié. Sur les conseils de Madame de Maintenon, il prépara un plan de réforme et de législation pour soulager la misère du peuple. Cette initiative _e fut malheureusement pas prisée par Louis XIV, qui prononça la disgrâce du
 
zcète.
 
zcète.
 
 
Après cette conversation avec le duc, Marie décide de parler enfin au _c_. Cependant, il n'est pas encore temps, car c'est l'heure du Conseil. En a endant, Marie se rend au grand Trianon, où des courtisans ont l'habitude ='=changer des propos politiques et militaires. Remontant l'allée de la Petite ï_nise puis celle de Saint-Antoine, Marie s'engage sur l'avenue de Trianon.
 
Après cette conversation avec le duc, Marie décide de parler enfin au _c_. Cependant, il n'est pas encore temps, car c'est l'heure du Conseil. En a endant, Marie se rend au grand Trianon, où des courtisans ont l'habitude ='=changer des propos politiques et militaires. Remontant l'allée de la Petite ï_nise puis celle de Saint-Antoine, Marie s'engage sur l'avenue de Trianon.
 
hein faisant, elle pense à la vie de la Cour; on rencontre à Versailles des gentilshommes qui attendent ou espèrent du roi une rente, une lettre de crédit ~.. cuelque obligation. Versailles grouille aussi de toutes sortes d'hommes de divers corps de métiers tirant profit de la Cour: les écrivains et poètes y sêRètent en s'y faisant applaudir ou en récoltant des bâillements; les :ai eurs attendent des commandes, tout comme les carrossiers ou les ét4nistes... Marie est gênée par la présence de cette foule qui peut rendre -1:ffl cile une entrevue personnelle et confidentielle avec le roi.
 
hein faisant, elle pense à la vie de la Cour; on rencontre à Versailles des gentilshommes qui attendent ou espèrent du roi une rente, une lettre de crédit ~.. cuelque obligation. Versailles grouille aussi de toutes sortes d'hommes de divers corps de métiers tirant profit de la Cour: les écrivains et poètes y sêRètent en s'y faisant applaudir ou en récoltant des bâillements; les :ai eurs attendent des commandes, tout comme les carrossiers ou les ét4nistes... Marie est gênée par la présence de cette foule qui peut rendre -1:ffl cile une entrevue personnelle et confidentielle avec le roi.
 
 
Ayant été gouvernante des enfants royaux et dame d'atours de la reine, ?f,ar_e est connue du roi, et elle est en général bien considérée par les _z_:rtisans. Bien que n'étant pas duchesse, elle a droit à un tabouret chez la Princesse Marie-Anne-Christine de Bavière, épouse du Grand Dauphin. On lui a aÉme proposé le poste de dame d'honneur de la dauphine, mais elle a refusé, ne se sentant pas le coeur à refaire avec cette jeune femme les mêmes gestes _ =lie avait accomplis avec la reine défunte.
 
Ayant été gouvernante des enfants royaux et dame d'atours de la reine, ?f,ar_e est connue du roi, et elle est en général bien considérée par les _z_:rtisans. Bien que n'étant pas duchesse, elle a droit à un tabouret chez la Princesse Marie-Anne-Christine de Bavière, épouse du Grand Dauphin. On lui a aÉme proposé le poste de dame d'honneur de la dauphine, mais elle a refusé, ne se sentant pas le coeur à refaire avec cette jeune femme les mêmes gestes _ =lie avait accomplis avec la reine défunte.
 
 
Au Grand Trianon, elle se rend dans une salle où s'assemblent d'ordinaire ceux qui ne sont pas attirés par le jeu. Il y règne un vacarme indéfinissable, car les conversations fusent de toutes parts. Aujourd'hui, on parle de la
 
Au Grand Trianon, elle se rend dans une salle où s'assemblent d'ordinaire ceux qui ne sont pas attirés par le jeu. Il y règne un vacarme indéfinissable, car les conversations fusent de toutes parts. Aujourd'hui, on parle de la
 
dernière guerre qui a duré neuf ans, de 1688 à 1697. Ce fut la guerre de la ligne d'Augsbourg. Elle avait débuté lorsque Louis XIV avait essayé, en vain,
 
dernière guerre qui a duré neuf ans, de 1688 à 1697. Ce fut la guerre de la ligne d'Augsbourg. Elle avait débuté lorsque Louis XIV avait essayé, en vain,
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de rétablir Jacques II sur le trône d'Angleterre: il y avait eu une expédition d'Irlande, puis une défaite de Tourville à la Hougue, qui avait fortement marqué les esprits. Louis XIV s'était souvenu de l'exécution de Charles ler, condamné à mort par le Parlement anglais comme "traître ett tyran" et il s'était alors appliqué à soutenir la monarchie anglaise. Jacques II qui-soutenait une politique absolutiste et catholique était monté sur le trône. Pour sauver le protestantisme les Anglais appelèrent Guillaume III d'Orange, alors stathouder de Hollande et époux d'une des filles de Jacques II. Guillaume III s'empara du trône, forçant Jacques II à s'enfuir en France. C'est à ce moment que Louis XIV choisit d'intervenir pour maintenir le catholicisme en Angleterre. Il dut faire face à "la ligue d'Augsbourg', coalition européenne qui s'était opposée dès 1686 à sa politique de puissance. Louis XIV avait des adversaires de taille; il n'abandonna pas pour autant la lutte, et lança une offensive sur le Rhin.
 
de rétablir Jacques II sur le trône d'Angleterre: il y avait eu une expédition d'Irlande, puis une défaite de Tourville à la Hougue, qui avait fortement marqué les esprits. Louis XIV s'était souvenu de l'exécution de Charles ler, condamné à mort par le Parlement anglais comme "traître ett tyran" et il s'était alors appliqué à soutenir la monarchie anglaise. Jacques II qui-soutenait une politique absolutiste et catholique était monté sur le trône. Pour sauver le protestantisme les Anglais appelèrent Guillaume III d'Orange, alors stathouder de Hollande et époux d'une des filles de Jacques II. Guillaume III s'empara du trône, forçant Jacques II à s'enfuir en France. C'est à ce moment que Louis XIV choisit d'intervenir pour maintenir le catholicisme en Angleterre. Il dut faire face à "la ligue d'Augsbourg', coalition européenne qui s'était opposée dès 1686 à sa politique de puissance. Louis XIV avait des adversaires de taille; il n'abandonna pas pour autant la lutte, et lança une offensive sur le Rhin.
 
 
En 1689 il ordonna la destruction du Palatinat. Le frère du roi, Philippe, avait épousé en secondes noces Charlotte-Elisabeth, fille de l'électeur palatin. Elle avait toujours regretté les lieux de son enfance, notamment le château de Heidelberg, où elle avait été élevée. Celle que l'on appelait la Palatine avait beaucoup d'affection pour Louis XIV qu'elle décrivait comme un "brave et bon prince". A la mort de l'électeur, on apprit que le Palatinat devait passer par héritage à la ligue catholique de Neuburg. A cette nouvelle, Louis XIV décida de sauvegarder les droits de sa belle-soeur', et il ordonna à ses armées de ravager le Palatinat qui connut alors des jours bien difficiles. Les récits de soldats racontant l'immense incendie qui avait détruit la région étaient restés dans la mémoire de bien des courtisans.
 
En 1689 il ordonna la destruction du Palatinat. Le frère du roi, Philippe, avait épousé en secondes noces Charlotte-Elisabeth, fille de l'électeur palatin. Elle avait toujours regretté les lieux de son enfance, notamment le château de Heidelberg, où elle avait été élevée. Celle que l'on appelait la Palatine avait beaucoup d'affection pour Louis XIV qu'elle décrivait comme un "brave et bon prince". A la mort de l'électeur, on apprit que le Palatinat devait passer par héritage à la ligue catholique de Neuburg. A cette nouvelle, Louis XIV décida de sauvegarder les droits de sa belle-soeur', et il ordonna à ses armées de ravager le Palatinat qui connut alors des jours bien difficiles. Les récits de soldats racontant l'immense incendie qui avait détruit la région étaient restés dans la mémoire de bien des courtisans.
 
 
Mais Louis XIV avait d'autres ambitions. Depuis le traité de Nimègue, il menait une politique qui avait pour but d'agrandir le territoire français: pour cela, le roi s'appuyait sur l'imprécision des traités précédents qui cédaient des villes et des territoires avec leurs dépendances. Le terme de "dépendances" n'étant pas précis, Louis XIV en avait profité pour annexer à la Couronne neuf villes parmi lesquelles Montbéliard, Sarrebruck, et Strasbourg. Les membres de la ligue d'Augsbourg n'entendaient pas se laisser déposséder ainsi sans broncher. Après neuf ans de guerre on signa, en 1697, le Traité de Ryswick par lequel Louis XIV abandonnait la ville de Luxembourg et toutes ses possessions antérieures à la paix de Nimègue; il ne conservait que Strasbourg. Cette nouvelle avait fait grand bruit à la cour. Evidemment, la guerre était enfin finie, mais Louis XIV avait dû s'abaisser devant ses adversaires. Toutes ces années de lutte avaient été vaines: le territoire français restait identique, ou peu s'en fallait, à ce qu'il était dix ans auparavant!
 
Mais Louis XIV avait d'autres ambitions. Depuis le traité de Nimègue, il menait une politique qui avait pour but d'agrandir le territoire français: pour cela, le roi s'appuyait sur l'imprécision des traités précédents qui cédaient des villes et des territoires avec leurs dépendances. Le terme de "dépendances" n'étant pas précis, Louis XIV en avait profité pour annexer à la Couronne neuf villes parmi lesquelles Montbéliard, Sarrebruck, et Strasbourg. Les membres de la ligue d'Augsbourg n'entendaient pas se laisser déposséder ainsi sans broncher. Après neuf ans de guerre on signa, en 1697, le Traité de Ryswick par lequel Louis XIV abandonnait la ville de Luxembourg et toutes ses possessions antérieures à la paix de Nimègue; il ne conservait que Strasbourg. Cette nouvelle avait fait grand bruit à la cour. Evidemment, la guerre était enfin finie, mais Louis XIV avait dû s'abaisser devant ses adversaires. Toutes ces années de lutte avaient été vaines: le territoire français restait identique, ou peu s'en fallait, à ce qu'il était dix ans auparavant!
 
Pendant que, à l'extérieur, la gloire du Roi-Soleil se ternissait, il se passait un événement important à l'intérieur du royaume. Le 18 Octobre 1685, le roi avait pris une grave décision politique, poussé, dit-on, par Madame de Maintenon. C'était la révocation de l'Edit de Nantes.
 
Pendant que, à l'extérieur, la gloire du Roi-Soleil se ternissait, il se passait un événement important à l'intérieur du royaume. Le 18 Octobre 1685, le roi avait pris une grave décision politique, poussé, dit-on, par Madame de Maintenon. C'était la révocation de l'Edit de Nantes.
 
Dans la salle du Grand Trianon, le silence se fait tout à coup. Un homme, d'allure revêche, scrute l'auditoire d'un regard noir et prend la parole. Marie, aussi étonnée que les autres, écoute attentivement cet étrange individu:
 
Dans la salle du Grand Trianon, le silence se fait tout à coup. Un homme, d'allure revêche, scrute l'auditoire d'un regard noir et prend la parole. Marie, aussi étonnée que les autres, écoute attentivement cet étrange individu:
 
 
"Il y a quatorze ans Louis XIV a signé la révocation en proclamant ces mots: "Par cette épée que je tiens
 
"Il y a quatorze ans Louis XIV a signé la révocation en proclamant ces mots: "Par cette épée que je tiens
 
l'Eglise et la Foi je maintiens"
 
l'Eglise et la Foi je maintiens"
 
 
Il serait temps de considérer aujourd'hui les raisons et les conséquences de cet acte. Cette révocation stipulait le bannissement des pasteurs, l'interdiction à leurs fidèles de s'enfuir, la fermeture des écoles protestantes, le baptême des enfants des nouveaux convertis et la démolition
 
Il serait temps de considérer aujourd'hui les raisons et les conséquences de cet acte. Cette révocation stipulait le bannissement des pasteurs, l'interdiction à leurs fidèles de s'enfuir, la fermeture des écoles protestantes, le baptême des enfants des nouveaux convertis et la démolition
 
des derniers temples. A l'époque, souvenez-vous: le texte avait été solennellement affiché à Paris et des messagers à chevaux avaient été envoyés dans les provinces. Les huguenots s'inquiétaient, mais la foule restait indifférente. Tous les beaux esprits français avaient applaudi à cette décision. Je pense à Racine, à Fontenelle, à La Bruyère, à La Fontaine, mais surtout à Madame de Sévigné qui avait dit: "Jamais aucun roi n'a rien fait de si mémorable." Eh bien, mémorable, cela l'était en effet! Vauban, plus lucide que les autres, s'était récrié, et avait considéré que cette révocation était une erreur. Malgré la menace de disgrâce, il avait raison de s'inquiéter."
 
des derniers temples. A l'époque, souvenez-vous: le texte avait été solennellement affiché à Paris et des messagers à chevaux avaient été envoyés dans les provinces. Les huguenots s'inquiétaient, mais la foule restait indifférente. Tous les beaux esprits français avaient applaudi à cette décision. Je pense à Racine, à Fontenelle, à La Bruyère, à La Fontaine, mais surtout à Madame de Sévigné qui avait dit: "Jamais aucun roi n'a rien fait de si mémorable." Eh bien, mémorable, cela l'était en effet! Vauban, plus lucide que les autres, s'était récrié, et avait considéré que cette révocation était une erreur. Malgré la menace de disgrâce, il avait raison de s'inquiéter."
 
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Le conteur parle avec fougue. Marie se doute de ce qu'il va dire et l' écoute avec un mélange de curiosité et d'indignation anticipée:
 
Le conteur parle avec fougue. Marie se doute de ce qu'il va dire et l' écoute avec un mélange de curiosité et d'indignation anticipée:
 
 
"Il s'est passé bien des choses que l'on a voulu tenir secrètes parce que, finalement, personne n'avait à s'en réjouir. Avant cette révocation fatidique, on avait tenté d'imposer la religion catholique en forçant les huguenots à se convertir en les achetant. Une ordonnance royale allait plus loin, exemptant les convertis de l'obligation de loger les soldats qui n'avaient pas de caserne. On envoya intentionnellement chez les protestants des soldats appelés "dragons missionnaires" ou "missionnaires bottés", Ils obtinrent par la force un nombre impressionnant de conversions. Les protestants signaient leurs abjurations sous la menace d'un fusil. Le roi avait eu vent de tout cela et l'avait accepté parce qu'il considérait que c'était la volonté divine de remettre sur le droit chemin ceux qui ne connaissaient pas la foi catholique! C'est Louvois, alors secrétaire d'Etat à la guerre, qui a rendu ces dragonnades de plus en plus fréquentes. Apprenant les conversions en masse, le roi crut qu'elles se faisaient de plein gré, et il a estimé inutile le maintien de l'Edit de Nantes.
 
"Il s'est passé bien des choses que l'on a voulu tenir secrètes parce que, finalement, personne n'avait à s'en réjouir. Avant cette révocation fatidique, on avait tenté d'imposer la religion catholique en forçant les huguenots à se convertir en les achetant. Une ordonnance royale allait plus loin, exemptant les convertis de l'obligation de loger les soldats qui n'avaient pas de caserne. On envoya intentionnellement chez les protestants des soldats appelés "dragons missionnaires" ou "missionnaires bottés", Ils obtinrent par la force un nombre impressionnant de conversions. Les protestants signaient leurs abjurations sous la menace d'un fusil. Le roi avait eu vent de tout cela et l'avait accepté parce qu'il considérait que c'était la volonté divine de remettre sur le droit chemin ceux qui ne connaissaient pas la foi catholique! C'est Louvois, alors secrétaire d'Etat à la guerre, qui a rendu ces dragonnades de plus en plus fréquentes. Apprenant les conversions en masse, le roi crut qu'elles se faisaient de plein gré, et il a estimé inutile le maintien de l'Edit de Nantes.
 
 
Sa révocation provoqua l'exode massive de ceux que les dragonnades avaient épargnés. Il y avait là des familles entières de négociants, notables pour leur fortune et l'étendue de leurs affaires. Il y avait aussi de riches artisans et surtout des négociants étrangers, suisses, hollandais et anglais. Ceux-ci furent accueillis hors des frontières, notamment à Potsdam par le Grand Electeur. J'ai entendu parler de près de soixante mille exilés volontaires! Imaginez-vous quelle ruine guette notre pays qui a perdu une grande partie de ceux sur qui reposaient le commerce et l'industrie! Je vous laisse à penser au désastre intérieur qui est en train de se produire dans notre royaume..."
 
Sa révocation provoqua l'exode massive de ceux que les dragonnades avaient épargnés. Il y avait là des familles entières de négociants, notables pour leur fortune et l'étendue de leurs affaires. Il y avait aussi de riches artisans et surtout des négociants étrangers, suisses, hollandais et anglais. Ceux-ci furent accueillis hors des frontières, notamment à Potsdam par le Grand Electeur. J'ai entendu parler de près de soixante mille exilés volontaires! Imaginez-vous quelle ruine guette notre pays qui a perdu une grande partie de ceux sur qui reposaient le commerce et l'industrie! Je vous laisse à penser au désastre intérieur qui est en train de se produire dans notre royaume..."
 
L'homme se tait et les courtisans restent pensifs.
 
L'homme se tait et les courtisans restent pensifs.
 
 
La cour, dans la vie frénétique et dispendieuse qu'elle mène, semble peu se préoccuper des indigents et des miséreux qui sont cependant de plus en plus nombreux dans le royaume de France. Le peuple est sans cesse accablé de nouveaux impôts: une ordonnance royale créa la capitation, impôt par tête qui vient heureusement d'être supprimé. Les tailles et les aides sont arbitrairement levées. Dans certaines provinces il existe des impositions sur les denrées comestibles telles que le pain, le vin et les viandes, ce qui rend les consommations plus rares, et plus chères. Près de la dixième partie du peuple est actuellement réduite à la mendicité. Comment faire pour qu'il sorte de la misère? N'est-ce pas dans ses rangs que l'on trouve soldats et matelots, marchands et petits officiers de judicature, commerçants et ouvriers, paysans et vignerons? Les gens que la misère du peuple préoccupe, et particulièrement
 
La cour, dans la vie frénétique et dispendieuse qu'elle mène, semble peu se préoccuper des indigents et des miséreux qui sont cependant de plus en plus nombreux dans le royaume de France. Le peuple est sans cesse accablé de nouveaux impôts: une ordonnance royale créa la capitation, impôt par tête qui vient heureusement d'être supprimé. Les tailles et les aides sont arbitrairement levées. Dans certaines provinces il existe des impositions sur les denrées comestibles telles que le pain, le vin et les viandes, ce qui rend les consommations plus rares, et plus chères. Près de la dixième partie du peuple est actuellement réduite à la mendicité. Comment faire pour qu'il sorte de la misère? N'est-ce pas dans ses rangs que l'on trouve soldats et matelots, marchands et petits officiers de judicature, commerçants et ouvriers, paysans et vignerons? Les gens que la misère du peuple préoccupe, et particulièrement
 
Vauban, pensent au rétablissement de la Dîme royale, impôt levé proportionnellement sur tout ce qui porte revenu... Mais les ministres sont trop accaparés par leur vie à la Cour pour s'occuper de ces souffrances.
 
Vauban, pensent au rétablissement de la Dîme royale, impôt levé proportionnellement sur tout ce qui porte revenu... Mais les ministres sont trop accaparés par leur vie à la Cour pour s'occuper de ces souffrances.
 
 
A Versailles non plus, tout n'est pas aussi brillant que l'on peut le croire. Les courtisans recherchent les faveurs du roi dans une course aux privilèges: assister au lever du roi, tenir son bougeoir au coucher, se voir octroyer un "justaucorps à brevet" permettant de l'escorter dans ses promenades et bien d'autres choses encore... Les faveurs sont variées mais finement dosées par le roi qui estime d'autant plus un courtisan que celui-ci est servile et assidu.
 
A Versailles non plus, tout n'est pas aussi brillant que l'on peut le croire. Les courtisans recherchent les faveurs du roi dans une course aux privilèges: assister au lever du roi, tenir son bougeoir au coucher, se voir octroyer un "justaucorps à brevet" permettant de l'escorter dans ses promenades et bien d'autres choses encore... Les faveurs sont variées mais finement dosées par le roi qui estime d'autant plus un courtisan que celui-ci est servile et assidu.
 
 
Marie songe, à ce propos, à l'ouvrage de Jean de La Bruyère. Chargé de l'instruction du petit-fils du Grand Condé, il a observé le monde et les moeurs des courtisans. Il notait quotidiennement des maximes diverses et des portraits qui furent publiés en 1688 sous le titre de "Caractères". Marie en a lu avec intérêt des pages savoureuses. Elle a particulièrement apprécié la série de maximes écrites sur le thème de la Cour où La Bruyère montre que, sous des dehors brillants, se cachent l'interêt et l'égoïsme le plus farouche. Quelques passages reviennent à la mémoire de Marie:
 
Marie songe, à ce propos, à l'ouvrage de Jean de La Bruyère. Chargé de l'instruction du petit-fils du Grand Condé, il a observé le monde et les moeurs des courtisans. Il notait quotidiennement des maximes diverses et des portraits qui furent publiés en 1688 sous le titre de "Caractères". Marie en a lu avec intérêt des pages savoureuses. Elle a particulièrement apprécié la série de maximes écrites sur le thème de la Cour où La Bruyère montre que, sous des dehors brillants, se cachent l'interêt et l'égoïsme le plus farouche. Quelques passages reviennent à la mémoire de Marie:
 
"Un homme qui sait la Cour est maître de son geste, de ses yeux, de son visage; il est profond, impénétrable; il dissimule les mauvais offices, sourit à ses ennemis, contraint son humeur, déguise ses passions, dément son coeur, parle, agit contre ses sentiments."
 
"Un homme qui sait la Cour est maître de son geste, de ses yeux, de son visage; il est profond, impénétrable; il dissimule les mauvais offices, sourit à ses ennemis, contraint son humeur, déguise ses passions, dément son coeur, parle, agit contre ses sentiments."
 
 
La Bruyère note aussi: "L'air de Cour est contagieux: il se prend à Versailles, comme l'accent normand à Rouen ou à Falaise;". Les intrigues à la
 
La Bruyère note aussi: "L'air de Cour est contagieux: il se prend à Versailles, comme l'accent normand à Rouen ou à Falaise;". Les intrigues à la
Cour ne manquent pas pour monnayer les services, pour obtenir un droit ou une edevance. Il existe tout un trafic de brevets, d'invitations, et de remises e placets. Chaque courtisan essaye par tous les moyens d'arriver à ses fins. ans l'antichambre du château tous ceux qui ont motif de se plaindre peuvent époser un placet sur une table dressée chaque lundi à cet effet. Après la esse, le roi se les fait lire par le secrétaire et donne des ordres en onséquence.
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our ne manquent pas pour monnayer les services, pour obtenir un droit ou une edevance. Il existe tout un trafic de brevets, d'invitations, et de remises e placets. Chaque courtisan essaye par tous les moyens d'arriver à ses fins. ans l'antichambre du château tous ceux qui ont motif de se plaindre peuvent époser un placet sur une table dressée chaque lundi à cet effet. Après la esse, le roi se les fait lire par le secrétaire et donne des ordres en onséquence.
 
De plus, la vie matérielle à Versailles laisse â désirer: les ntichambres et les escaliers sont généralement malpropres, et il règne artcut et à tout moment une cohue faite d'incessants va-et-vient qui atiguent Marie. Elle a peur également des vols qui sont nombreux au château. es corridors et les escaliers sont souvent hantés par des badauds, des aquais, prostituées ou marchands ambulants, Tout cela se passe sous le nez es Cent-Suisses, des deux compagnies de Mousquetaires et des quatre ompagnies de Gardes du Corps qui ne font guère qu'un service d'apparat auprès u rci.
 
De plus, la vie matérielle à Versailles laisse â désirer: les ntichambres et les escaliers sont généralement malpropres, et il règne artcut et à tout moment une cohue faite d'incessants va-et-vient qui atiguent Marie. Elle a peur également des vols qui sont nombreux au château. es corridors et les escaliers sont souvent hantés par des badauds, des aquais, prostituées ou marchands ambulants, Tout cela se passe sous le nez es Cent-Suisses, des deux compagnies de Mousquetaires et des quatre ompagnies de Gardes du Corps qui ne font guère qu'un service d'apparat auprès u rci.
 
 
Les appartements sont inconfortables, et l'on gèle dans les grandes alles du château. Marie pense qu'il est d'ailleurs temps de rentrer chez lle.
 
Les appartements sont inconfortables, et l'on gèle dans les grandes alles du château. Marie pense qu'il est d'ailleurs temps de rentrer chez lle.
 
 
Il est une heure. La matinée finie, les courtisans se dispersent apidement. Le roi est sans doute en train de dîner "au petit couvert": il ange seul dans sa chambre, sur une table près de la fenêtre du milieu et le epas se compose de trois services, sans le fruit. Marie, quant à elle, va mer dans son appartement, où Francinette lui a préparé une rapide collation, Depuis qu'elle n'a plus de charge officielle à Versailles, elle n'habite plus n grand appartement comme autrefois, mais une suite de trois pièces, ntchambre, salon et minuscule boudoir donnant sur l'aile du côté nord, ayant ue sur le boulevard de la Reine. Marie ne se plaint pas car elle est de toute açoo__ mieux lotie que beaucoup des courtisans qui.doivent se contenter d'une auvaise chambre sous les combles. La plupart d'entre eux préfèrent rester là, ivant dans des conditions déplorables, souffrant du froid, de l'étroitesse es :oraux et du manque total d'hygiène, plutôt que de retourner croupir dans eur province. Un courtisan n'affirmait-il pas récemment: "J'aime autant courir que d'être deux ou trois mois sans voir le roi!". Après le repas, Marie 'a s'occuper de son courrier et répondre à sa cousine qui vient de lui envoyer .ne charmante lettre.
 
Il est une heure. La matinée finie, les courtisans se dispersent apidement. Le roi est sans doute en train de dîner "au petit couvert": il ange seul dans sa chambre, sur une table près de la fenêtre du milieu et le epas se compose de trois services, sans le fruit. Marie, quant à elle, va mer dans son appartement, où Francinette lui a préparé une rapide collation, Depuis qu'elle n'a plus de charge officielle à Versailles, elle n'habite plus n grand appartement comme autrefois, mais une suite de trois pièces, ntchambre, salon et minuscule boudoir donnant sur l'aile du côté nord, ayant ue sur le boulevard de la Reine. Marie ne se plaint pas car elle est de toute açoo__ mieux lotie que beaucoup des courtisans qui.doivent se contenter d'une auvaise chambre sous les combles. La plupart d'entre eux préfèrent rester là, ivant dans des conditions déplorables, souffrant du froid, de l'étroitesse es :oraux et du manque total d'hygiène, plutôt que de retourner croupir dans eur province. Un courtisan n'affirmait-il pas récemment: "J'aime autant courir que d'être deux ou trois mois sans voir le roi!". Après le repas, Marie 'a s'occuper de son courrier et répondre à sa cousine qui vient de lui envoyer .ne charmante lettre.
 
 
Quand elle quitte son appartement, il est près de trois heures. Le roi st, dit-on, parti pour la chasse et Marie décide de le rejoindre. Depuis u' il fit une mauvaise chute à cheval, il se déplace dans une calèche conduite par quatre chevaux, dont le dessus se replie en manière de soufflet. Marie 'informe auprès d'un laquais pour savoir dans quelle direction sont partis la alèche et les équipages de la chasse à courre. Le laquais répond que le roi .'est pas allé courir le cerf mais qu'il s'est rendu à la Faisanderie. Tenté ,ar _a journée radieuse, il est allé faire une chasse à tir.
 
Quand elle quitte son appartement, il est près de trois heures. Le roi st, dit-on, parti pour la chasse et Marie décide de le rejoindre. Depuis u' il fit une mauvaise chute à cheval, il se déplace dans une calèche conduite par quatre chevaux, dont le dessus se replie en manière de soufflet. Marie 'informe auprès d'un laquais pour savoir dans quelle direction sont partis la alèche et les équipages de la chasse à courre. Le laquais répond que le roi .'est pas allé courir le cerf mais qu'il s'est rendu à la Faisanderie. Tenté ,ar _a journée radieuse, il est allé faire une chasse à tir.
 
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Marie hèle une chaise de poste qui attend sur la grande Place d'armes, ituée sur l'avant du château, Elle indique au cocher la Faisanderie. Pour s'y end.e, il faut emprunter la Route de Saint-Cyr, bordée par le Bosquet de la -eine, le Bassin du Miroir, puis le Jardin du roi, où les courtisans sont peu .ombreux. Sans doute se sont-ils rendus en masse à la Faisanderie que Marie tteint après avoir dépassé l'allée des Matelots.
Marie hèle une chaise de poste qui attend sur la grande Place d'armes, ituée sur l'avant du  
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château, Elle indique au cocher la Faisanderie. Pour s'y end.e, il faut emprunter la Route de Saint-Cyr, bordée par le Bosquet de la -eine, le Bassin du Miroir, puis le Jardin du roi, où les courtisans sont peu .ombreux. Sans doute se sont-ils rendus en masse à la Faisanderie que Marie tteint après avoir dépassé l'allée des Matelots.
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Comme Marie s'en doutait l'agitation est considérable. La Faisanderie est sn vaste enclos dans lequel perdrix et faisans sont élevés. A l'heure de la ;à.asse, ils sont régulièrement lachés devant les tireurs aux aguets. Le roi rxce.Le généralement dans cet exercice. Marie, qui s'est approchée davantage .ans la foule des courtisans, comprend que la chasse est presque finie: le roi
 
Comme Marie s'en doutait l'agitation est considérable. La Faisanderie est sn vaste enclos dans lequel perdrix et faisans sont élevés. A l'heure de la ;à.asse, ils sont régulièrement lachés devant les tireurs aux aguets. Le roi rxce.Le généralement dans cet exercice. Marie, qui s'est approchée davantage .ans la foule des courtisans, comprend que la chasse est presque finie: le roi
 
déjà tué une trentaine de pièces de gibier. A cause de la goutte qui le fait .ouffrir, il a imaginé une chaise à porteur dans laquelle il se montre aussi >cn tireur qu'auparavant. La chasse terminée, le roi distribue aux dames le ;ib4_er qu'il a tué: celles-ci le pendent à leur ceinture, et rentrent :ricmchalement au château. Marie, voulant gagner les grâces du roi, s'avance 'ers ui pour être aux premières loges durant la distribution. Le roi donne ives crodigalité les faisans morts. Il est vêtu d'un habit brun, sa couleur >référée. On voit sur son pourpoint quelques traces de la poussière de sable [ui recouvre le sol. Auprès de lui sont couchées ses chiennes favorites, Diane
 
déjà tué une trentaine de pièces de gibier. A cause de la goutte qui le fait .ouffrir, il a imaginé une chaise à porteur dans laquelle il se montre aussi >cn tireur qu'auparavant. La chasse terminée, le roi distribue aux dames le ;ib4_er qu'il a tué: celles-ci le pendent à leur ceinture, et rentrent :ricmchalement au château. Marie, voulant gagner les grâces du roi, s'avance 'ers ui pour être aux premières loges durant la distribution. Le roi donne ives crodigalité les faisans morts. Il est vêtu d'un habit brun, sa couleur >référée. On voit sur son pourpoint quelques traces de la poussière de sable [ui recouvre le sol. Auprès de lui sont couchées ses chiennes favorites, Diane
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_t Blonde, jolies levrettes au poil lisse. Marie s'avance et le roi lui tend -une pièce de gibier. Puis, l'ayant reconnue, il lui fait un léger signe de tête. Profitant de la bonne humeur du roi, Marie salue avec la plus humble des révérences et dit:
 
_t Blonde, jolies levrettes au poil lisse. Marie s'avance et le roi lui tend -une pièce de gibier. Puis, l'ayant reconnue, il lui fait un léger signe de tête. Profitant de la bonne humeur du roi, Marie salue avec la plus humble des révérences et dit:
 
"Votre Majesté daignerait-elle m'accorder quelques minutes de son rrécieux temps? J'ai à l'entretenir d'une affaire secrète et confidentielle." Le roi esquisse un discret sourire.
 
"Votre Majesté daignerait-elle m'accorder quelques minutes de son rrécieux temps? J'ai à l'entretenir d'une affaire secrète et confidentielle." Le roi esquisse un discret sourire.
 
"Soit! Veuillez Nous attendre au carrefour de l'Etoile Royale. Nous serons content de deviser quelques instants avec vous."
 
"Soit! Veuillez Nous attendre au carrefour de l'Etoile Royale. Nous serons content de deviser quelques instants avec vous."
 
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Ayant dit, le roi salue Marie et se tourne délibérément d'un autre côté, =ntrant ainsi qu'il n'en dira pas davantage,
Ayant dit, le roi salue Marie et se tourne délibérément d'un autre côté, =ntrant ainsi qu'il n'en dira pas davantage.
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A Versailles, on sait que toutes les activités gravitent autour de celle du roi. C'est lui qui donne le ton: on pleure quand il est triste, on rit quand il sourit. Louis XIV, au centre de tous, propage son éclat: il possède une grande chambre, au centre du château et son lit est orienté dans le sens de la course du soleil. Lorsqu'il y a réception, il circule familièrement parmi ses invités auxquels il offre la danse, la musique et des jeux divers. Marie est particulièrement attirée par la musique et elle admire surtout celle
 
A Versailles, on sait que toutes les activités gravitent autour de celle du roi. C'est lui qui donne le ton: on pleure quand il est triste, on rit quand il sourit. Louis XIV, au centre de tous, propage son éclat: il possède une grande chambre, au centre du château et son lit est orienté dans le sens de la course du soleil. Lorsqu'il y a réception, il circule familièrement parmi ses invités auxquels il offre la danse, la musique et des jeux divers. Marie est particulièrement attirée par la musique et elle admire surtout celle
 
de Jean-Baptiste Lully, qui mourut en 1687, mais qui a imprégné largement la Cour de son génie musical. En parfaite concordance avec les vues du Roi-Soleil, Lully a rendu vétustes les anciens poncifs de la préciosité du début du Grand-Siècle. Né à Florence en 1632, c'est cependant en France qu'il a tout appris; il entra, à quatorze ans, chez la Grande Mademoiselle qui désirait à son service un jeune page toscan pour converser dans la langue de Jante qu'elle étudiait. Devinant les dons de son page, la duchesse lui fit étudier la danse et le violon. Lully fut ensuite reçu parmi les vingt quatre Violons du Roy et se fit remarquer dans le "Ballet de la Nuit" comme danseur et mime. Dans ce ballet, Louis XIV tenait lui-même un rôle, et Lully le mettait constamment à la première place, flattant ainsi son orgueil. Lorsque le roi n'attrapait pas la cadence, Lully passait devant lui, improvisant un jeu de scène afin de lui montrer ce qu'il devait faire, puis s'écartait le plus naturellement du monde. Dès lors, le musicien connut une ascension fulgurante, étant protégé par le roi, Il fut successivement Compositeur puis Surintendant de la Musique instrumentale, fonda les Petits Violons du Roy, puis prit la direction de l'Opéra, étant nommé directeur de l'Académie royale de Musique en 1672. Pour le public de Versailles, Lully était un incomparable organisateur de spectacles. Il avait trouvé le ton juste pour présenter des divertissements raffinés. Il advint que Lully collaborât avec Molière. Les succès de leurs comédies-ballets furent tels pour Lully qu'on le louât souvent seul, passant Molière sous silence... Pourtant, Marie pense encore aujourd'hui que le succès du "Bourgeois gentilhomme" était autant dû à la verve comique de Molière qu'au style délicat de Lully!
 
de Jean-Baptiste Lully, qui mourut en 1687, mais qui a imprégné largement la Cour de son génie musical. En parfaite concordance avec les vues du Roi-Soleil, Lully a rendu vétustes les anciens poncifs de la préciosité du début du Grand-Siècle. Né à Florence en 1632, c'est cependant en France qu'il a tout appris; il entra, à quatorze ans, chez la Grande Mademoiselle qui désirait à son service un jeune page toscan pour converser dans la langue de Jante qu'elle étudiait. Devinant les dons de son page, la duchesse lui fit étudier la danse et le violon. Lully fut ensuite reçu parmi les vingt quatre Violons du Roy et se fit remarquer dans le "Ballet de la Nuit" comme danseur et mime. Dans ce ballet, Louis XIV tenait lui-même un rôle, et Lully le mettait constamment à la première place, flattant ainsi son orgueil. Lorsque le roi n'attrapait pas la cadence, Lully passait devant lui, improvisant un jeu de scène afin de lui montrer ce qu'il devait faire, puis s'écartait le plus naturellement du monde. Dès lors, le musicien connut une ascension fulgurante, étant protégé par le roi, Il fut successivement Compositeur puis Surintendant de la Musique instrumentale, fonda les Petits Violons du Roy, puis prit la direction de l'Opéra, étant nommé directeur de l'Académie royale de Musique en 1672. Pour le public de Versailles, Lully était un incomparable organisateur de spectacles. Il avait trouvé le ton juste pour présenter des divertissements raffinés. Il advint que Lully collaborât avec Molière. Les succès de leurs comédies-ballets furent tels pour Lully qu'on le louât souvent seul, passant Molière sous silence... Pourtant, Marie pense encore aujourd'hui que le succès du "Bourgeois gentilhomme" était autant dû à la verve comique de Molière qu'au style délicat de Lully!
 
 
Mises à part les réjouissances musicales, les journées sont rythmées selon les occupations des plus grands des courtisans: Madame de Maintenon attire autour d'elle une véritable cour. Mariée secrètement avec Louis XIV, probablement en octobre 1683, elle bénéficie des plus grands privilèges. Elle a un appartement entier au premier étage: deux antichambres, une chambre et un grand cabinet, le tout de plain-pied avec celui du roi qui donne sur l'escalier de marbre. Les appartements royaux sont d'ailleurs d'un luxe inouï: les peintures des plafonds se combinent avec les stucs dorés; aux murs, recouverts de marbres et de velours, sont accrochés les tableaux de la collection royale.
 
Mises à part les réjouissances musicales, les journées sont rythmées selon les occupations des plus grands des courtisans: Madame de Maintenon attire autour d'elle une véritable cour. Mariée secrètement avec Louis XIV, probablement en octobre 1683, elle bénéficie des plus grands privilèges. Elle a un appartement entier au premier étage: deux antichambres, une chambre et un grand cabinet, le tout de plain-pied avec celui du roi qui donne sur l'escalier de marbre. Les appartements royaux sont d'ailleurs d'un luxe inouï: les peintures des plafonds se combinent avec les stucs dorés; aux murs, recouverts de marbres et de velours, sont accrochés les tableaux de la collection royale.
 
 
A la Cour, personne n'a rien à faire. Les "jours d'appartement" les courtisans se réunissent dans les salons de sept heures à dix heures du soir. On se restaure au salon de Vénus, on se désaltère dans le salon d'Abondance, on écoute de la musique au salon de Mars, on danse dans le salon d'Apollon. Le salon du billard ou salon de Diane, est une pièce spécialement aménagée pour ce jeu, avec deux estrades pour les dames. Dans le salon de Mercure les courtisans se livrent à une de leurs distractions favorites: le jeu. La politique royale est claire: plus les nobles dépensent, moins ils contestent et plus ils sont dépendants. Alors que les tripots sont fermés et les jeux de hasard interdits, au château les courtisans perdent des sommes folles. Au temps où Madame de Montespan était favorite, le roi avait coutume de jouer avec elle au jeu de trictrac ou au reversis, jeu de cartes dont les levées se
 
A la Cour, personne n'a rien à faire. Les "jours d'appartement" les courtisans se réunissent dans les salons de sept heures à dix heures du soir. On se restaure au salon de Vénus, on se désaltère dans le salon d'Abondance, on écoute de la musique au salon de Mars, on danse dans le salon d'Apollon. Le salon du billard ou salon de Diane, est une pièce spécialement aménagée pour ce jeu, avec deux estrades pour les dames. Dans le salon de Mercure les courtisans se livrent à une de leurs distractions favorites: le jeu. La politique royale est claire: plus les nobles dépensent, moins ils contestent et plus ils sont dépendants. Alors que les tripots sont fermés et les jeux de hasard interdits, au château les courtisans perdent des sommes folles. Au temps où Madame de Montespan était favorite, le roi avait coutume de jouer avec elle au jeu de trictrac ou au reversis, jeu de cartes dont les levées se
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font "à l'envers", Il y avait souvent avec eux monsieur Dangeau, célèbre joueur. On joue aussi au jeu de l'oie et au hoca. Ce jeu, venu d'Espagne, comprend un tableau de trente cases et trente boules de bois percées qui recoivent un billet roulé identique à l'une des cases du tableau. On remue ces boules dans un sac, on en tire une dont on fait sortir le billet qui indique ainsi le gagnant. Les courtisans raffolent de ce genre de loterie. Ils aiment toutes les sortes de jeu, dans lesquels ils misent souvent de grosses sommes. C'est un véritable événement quand le roi traverse ces salons: tout le monde cesse ses activités et se précipite pour apercevoir la personne royale,
 
font "à l'envers", Il y avait souvent avec eux monsieur Dangeau, célèbre joueur. On joue aussi au jeu de l'oie et au hoca. Ce jeu, venu d'Espagne, comprend un tableau de trente cases et trente boules de bois percées qui recoivent un billet roulé identique à l'une des cases du tableau. On remue ces boules dans un sac, on en tire une dont on fait sortir le billet qui indique ainsi le gagnant. Les courtisans raffolent de ce genre de loterie. Ils aiment toutes les sortes de jeu, dans lesquels ils misent souvent de grosses sommes. C'est un véritable événement quand le roi traverse ces salons: tout le monde cesse ses activités et se précipite pour apercevoir la personne royale,
 
A Versailles, tout est marqué par l'étiquette, cet ordre des préséances, véritable cérémonial. Madame de Maintenon a dit un jour: "Il n'y a point dans les couvents d'austérités pareilles à celles auxquelles l'étiquette de la Cour assujettit les grands." L'étiquette est particulièrement remarquable lors des repas. Le dîner "au grand couvert", c'est-à-dire en public, débute par le cérémonial de l'Essai. Celui-ci consiste à s'assurer que rien n'est empoisonné. C'est le rôle des courtisans du service de la Bouche du Roy,
 
A Versailles, tout est marqué par l'étiquette, cet ordre des préséances, véritable cérémonial. Madame de Maintenon a dit un jour: "Il n'y a point dans les couvents d'austérités pareilles à celles auxquelles l'étiquette de la Cour assujettit les grands." L'étiquette est particulièrement remarquable lors des repas. Le dîner "au grand couvert", c'est-à-dire en public, débute par le cérémonial de l'Essai. Celui-ci consiste à s'assurer que rien n'est empoisonné. C'est le rôle des courtisans du service de la Bouche du Roy,
 
comportant. sept offices parmi lesquels le Gobelet du Roy, l'Echansonnerie-bouche et la Paneterie-bouche. Les courtisans appartiennent à des catégories différentes: il y a ceux de la Maison civile du Roy, la Maison de la Reine, celles du Dauphin, de Monsieur, des princes et des princesses. Outre celui de la Bouche, les services principaux sont ceux de la Chapelle, de la Chambre, de l'Ecurie, de la Vénerie et de la Maison militaire du Roy.
 
comportant. sept offices parmi lesquels le Gobelet du Roy, l'Echansonnerie-bouche et la Paneterie-bouche. Les courtisans appartiennent à des catégories différentes: il y a ceux de la Maison civile du Roy, la Maison de la Reine, celles du Dauphin, de Monsieur, des princes et des princesses. Outre celui de la Bouche, les services principaux sont ceux de la Chapelle, de la Chambre, de l'Ecurie, de la Vénerie et de la Maison militaire du Roy.
 
 
Marie assiste rarement au dîner "au grand couvert" mais apprécie la compagnie du roi lorsque la foule se disperse. La promesse d'une rencontre avec lui, et peut-être d'une lumière faite sur l'incertitude du sort de son frère la réjouissent. Lentement, elle se dirige vers l'Etoile Royale. Elle passe devant la Ménagerie, qu'elle laisse sur sa droite. Il y a là des autruches, des gazelles, des phoques, un rhinocéros, un éléphant, et surtout une multitude d'oiseaux. A l'extrémité de la route de Saint-Cyr, elle pourrait prendre l'allée de Maintenon qui la conduirait directement au lieu de rendez-vous. Mais, comme elle a du temps devant elle, elle préfère obliquer sur la droite et emprunter un moment l'allée de Choisy. Elle tourne ensuite sur sa gauche, s'engageant sur la longue avenue des Tuileries, L'Etoile Royale est un vaste carrefour, où se rejoignent une dizaine de chemins parmi lesquels l'allée de Maintenon, l'avenue des Tuileries, le chemin du Grand Canal et l'allée de Fontenay. Pour attendre le roi, Marie choisit un emplacement discret, mais d'où elle peut voir toutes les allée et venues, nombreuses en cette fin d'aprè-midi. Après une demi-heure d'attente, elle entend des bruits confus venant du Grand Canal: ils annoncent l'arrivée du roi, assis dans sa chaise à porteur, et entouré d'une foule bruyante. Celui-ci, sur un signe, fait arrêter sa chaise, et, sur un autre signe, ordonne aux courtisans de s'éloigner. Marie peut alors s'approcher. Le roi lui sourit, se lève, et dit:
 
Marie assiste rarement au dîner "au grand couvert" mais apprécie la compagnie du roi lorsque la foule se disperse. La promesse d'une rencontre avec lui, et peut-être d'une lumière faite sur l'incertitude du sort de son frère la réjouissent. Lentement, elle se dirige vers l'Etoile Royale. Elle passe devant la Ménagerie, qu'elle laisse sur sa droite. Il y a là des autruches, des gazelles, des phoques, un rhinocéros, un éléphant, et surtout une multitude d'oiseaux. A l'extrémité de la route de Saint-Cyr, elle pourrait prendre l'allée de Maintenon qui la conduirait directement au lieu de rendez-vous. Mais, comme elle a du temps devant elle, elle préfère obliquer sur la droite et emprunter un moment l'allée de Choisy. Elle tourne ensuite sur sa gauche, s'engageant sur la longue avenue des Tuileries, L'Etoile Royale est un vaste carrefour, où se rejoignent une dizaine de chemins parmi lesquels l'allée de Maintenon, l'avenue des Tuileries, le chemin du Grand Canal et l'allée de Fontenay. Pour attendre le roi, Marie choisit un emplacement discret, mais d'où elle peut voir toutes les allée et venues, nombreuses en cette fin d'aprè-midi. Après une demi-heure d'attente, elle entend des bruits confus venant du Grand Canal: ils annoncent l'arrivée du roi, assis dans sa chaise à porteur, et entouré d'une foule bruyante. Celui-ci, sur un signe, fait arrêter sa chaise, et, sur un autre signe, ordonne aux courtisans de s'éloigner. Marie peut alors s'approcher. Le roi lui sourit, se lève, et dit:
 
 
"Il Nous serait agréable de deviser avec vous à l'écart. Allons sur le banc que Nous apercevons là-bas,"
 
"Il Nous serait agréable de deviser avec vous à l'écart. Allons sur le banc que Nous apercevons là-bas,"
 
 
Désignant un emplacement peu éloigné, il s'y dirige avec Marie. Les courtisans, obéissants sont restés en arrière, et Marie peut parler en toute liberté. Elle raconte au roi comment, il y a si longtemps, son frère a disparu, puis les soupçons qu'elle a conçus depuis la nouvelle de l'emprisonnement du Masque de Fer. Le roi écoute, impassible. Les yeux fixés au loin, il semble penser à autre chose mais ne peut cacher une légère agitation intérieure lorsque Marie prononce le nom de Masque de Fer. Elle sent combien il est troublé maintenant. Avec hardiesse, elle ose tout de même lui demander:
 
Désignant un emplacement peu éloigné, il s'y dirige avec Marie. Les courtisans, obéissants sont restés en arrière, et Marie peut parler en toute liberté. Elle raconte au roi comment, il y a si longtemps, son frère a disparu, puis les soupçons qu'elle a conçus depuis la nouvelle de l'emprisonnement du Masque de Fer. Le roi écoute, impassible. Les yeux fixés au loin, il semble penser à autre chose mais ne peut cacher une légère agitation intérieure lorsque Marie prononce le nom de Masque de Fer. Elle sent combien il est troublé maintenant. Avec hardiesse, elle ose tout de même lui demander:
 
 
-"Sire, enlevez-moi ce doute affreux dans lequel je vis depuis des années; dites-moi quel est ce prisonnier mystérieux que je ne puis dissocier du visage de mon frère disparu".
 
-"Sire, enlevez-moi ce doute affreux dans lequel je vis depuis des années; dites-moi quel est ce prisonnier mystérieux que je ne puis dissocier du visage de mon frère disparu".
 
Le roi fronce les sourcils et parait songeur, Fuis il répond;
 
Le roi fronce les sourcils et parait songeur, Fuis il répond;
 
 
-"Vous comprendrez, Madame, que je ne peux trahir pour vous un secret d'état; je vais néanmoins vous en dire plus que la nécessité ne m'y autorise. Ce prisonnier n'est pas votre frère et je suis bien étonné qu'une idée pareille vous soit venue. Si vous avez perdu sa trace c'est que, il y a bien des années, il bommit ce que l'on pourrait appeler une erreur de jeunesse. Il tomba follement amoureux d'une jeune et jolie personne qui, malheureusement, était mariée au plus abominable barbon qui soit. De plus, le mari possédait
 
-"Vous comprendrez, Madame, que je ne peux trahir pour vous un secret d'état; je vais néanmoins vous en dire plus que la nécessité ne m'y autorise. Ce prisonnier n'est pas votre frère et je suis bien étonné qu'une idée pareille vous soit venue. Si vous avez perdu sa trace c'est que, il y a bien des années, il bommit ce que l'on pourrait appeler une erreur de jeunesse. Il tomba follement amoureux d'une jeune et jolie personne qui, malheureusement, était mariée au plus abominable barbon qui soit. De plus, le mari possédait
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une haute charge dans l'administration et il était très influent. Il a usé de son pouvoir pour forcer votre frère à laisser là cette affaire et A ne plus penser à la belle dame. Mais le jeune amoureux n'entendit que les mouvements de son coeur et s'embarqua avec sa maîtresse sur un bateau qui devait les emmener jusqu'aux Amériques."
 
une haute charge dans l'administration et il était très influent. Il a usé de son pouvoir pour forcer votre frère à laisser là cette affaire et A ne plus penser à la belle dame. Mais le jeune amoureux n'entendit que les mouvements de son coeur et s'embarqua avec sa maîtresse sur un bateau qui devait les emmener jusqu'aux Amériques."
 
 
Le roi se tait. Marie comprend qu'il a autre chose à dire; elle le presse de poursuivre:
 
Le roi se tait. Marie comprend qu'il a autre chose à dire; elle le presse de poursuivre:
 
 
-"Je ne sais si je dois le faire" répond le roi, embarrassé.
 
-"Je ne sais si je dois le faire" répond le roi, embarrassé.
 
 
Cependant, devant l'insistance de Marie, il reprend:
 
Cependant, devant l'insistance de Marie, il reprend:
 
 
-"La suite de l'histoire vous sera, j'en ai peur, bien désagréable. Je me souviens que, peu de temps après la nouvelle de ce départ précipité, nous avons appris que le navire avait été attaqué par des brigands qui n'avaient laissé aucun survivant après leur forfait. Votre frère et l'élue de son coeur ont donc péri ensemble..." Marie baisse la tête, et deux larmes glissent lentement sur ses joues. Ainsi, telle est la vérité: elle qui aimait tant son frère ne le reverra plus jamais; cet être doux et rieur fut emporté par les flots au printemps de sa vie...
 
-"La suite de l'histoire vous sera, j'en ai peur, bien désagréable. Je me souviens que, peu de temps après la nouvelle de ce départ précipité, nous avons appris que le navire avait été attaqué par des brigands qui n'avaient laissé aucun survivant après leur forfait. Votre frère et l'élue de son coeur ont donc péri ensemble..." Marie baisse la tête, et deux larmes glissent lentement sur ses joues. Ainsi, telle est la vérité: elle qui aimait tant son frère ne le reverra plus jamais; cet être doux et rieur fut emporté par les flots au printemps de sa vie...
 
 
Marie est bouleversée; et ressent un poids immense sur ses épaules. Le roi, d'un geste plein de tendresse, lui prend la main.
 
Marie est bouleversée; et ressent un poids immense sur ses épaules. Le roi, d'un geste plein de tendresse, lui prend la main.
 
 
-"Chère amie, ne pleurez pas, vos larmes ne pourront rien changer. La meilleure preuve d'amour que vous puissiez donner à votre frère, c'est de garder toujours au fond du coeur son souvenir, avec la certitude què, près de Dieu, il est heureux maintenant. Il est d'ailleurs grand temps que vous pensiez, vous aussi, à votre bonheur. Séchez vos larmes, et acceptez, s'il vous plaît, mon affection. Vous serez désormais la soeur que je n'ai pas eue. J'espère que la vie vous sera douce et agréable..."
 
-"Chère amie, ne pleurez pas, vos larmes ne pourront rien changer. La meilleure preuve d'amour que vous puissiez donner à votre frère, c'est de garder toujours au fond du coeur son souvenir, avec la certitude què, près de Dieu, il est heureux maintenant. Il est d'ailleurs grand temps que vous pensiez, vous aussi, à votre bonheur. Séchez vos larmes, et acceptez, s'il vous plaît, mon affection. Vous serez désormais la soeur que je n'ai pas eue. J'espère que la vie vous sera douce et agréable..."
 
 
Marie lève la tête, et sourit.
 
Marie lève la tête, et sourit.
 
 
Au bras du Roi-Soleil, elle rentre alors au château.
 
Au bras du Roi-Soleil, elle rentre alors au château.
  
 
Demain vont commencer les grandes fêtes qui marqueront le passage au XVIIIème siècle...
 
Demain vont commencer les grandes fêtes qui marqueront le passage au XVIIIème siècle...
  
== Conclusion ==
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CaNCLU.SIciN
  
 
Après les somptueuses fêtes qui ont marqué l'année 1700, il reste encore à Louis XIV quinze ans à vivre. La fin de son règne s'oppose à l'apogée de puissance qu'il a connue jusqu'alors. Une époque funeste et désastreuse s'installe sur la France, marquée notamment par les révoltes des Camisards, protestants des Cévennes. Par ailleurs la guerre de Succession d'Espagne est déclarée. Louis XIV veut que son petit-fils Philippe V préserve ses droits sur l'Espagne. Cette guerre débutée en 1701, prend fin avec les Traités d'Utrecht signés en 1713, complétés l'année suivante par le traité de Rastadt. Philippe V garde l'Espagne et ses colonies. Louis XIV conserve les plus importantes conquêtes de son règne, c'est-à-dire l'Alsace, le Roussillon, l'Artois, la Flandre et la Franche-Comté. Mais la France est épuisée.
 
Après les somptueuses fêtes qui ont marqué l'année 1700, il reste encore à Louis XIV quinze ans à vivre. La fin de son règne s'oppose à l'apogée de puissance qu'il a connue jusqu'alors. Une époque funeste et désastreuse s'installe sur la France, marquée notamment par les révoltes des Camisards, protestants des Cévennes. Par ailleurs la guerre de Succession d'Espagne est déclarée. Louis XIV veut que son petit-fils Philippe V préserve ses droits sur l'Espagne. Cette guerre débutée en 1701, prend fin avec les Traités d'Utrecht signés en 1713, complétés l'année suivante par le traité de Rastadt. Philippe V garde l'Espagne et ses colonies. Louis XIV conserve les plus importantes conquêtes de son règne, c'est-à-dire l'Alsace, le Roussillon, l'Artois, la Flandre et la Franche-Comté. Mais la France est épuisée.
  
Jusqu'à ses derniers jours, Louis XIV se considère comme un monarque de droit divin. Un célèbre portrait, peint en 1701 par Hyacinthe Rigaud, le représente debout, couvert du manteau royal, l'immortalisant ainsi pour l'éternité. Cependant, le temps des épreuves est venu pour le roi, plus solitaire que jamais. Une série de deuils vont, au cours des quinze dernières années, assombrir sa vieillesse: en 1701 meurt son frère Philippe et Jacques II d'Angleterre. Puis, en 1711, le Grand Dauphin est emporté par la petite vérole ; l'année suivante, la duchesse et le duc de Bourgogne meurent de la même épidémie, suivis de leur fils aîné. Le trône revient au cadet, le duc d'Anjou, arrière-petit-fils de Louis XIV. Ces malheurs accablent le roi qui, avec lassitude, continue de travailler, présidant les conseils et les cérémonies.
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Jusqu'à ses derniers jours, Louis XIV se considère comme un monarque de droit divin. Un célèbre portrait, peint en 1701 par Hyacinthe Rigaud, le représente debout, couvert du manteau royal, l'immortalisant ainsi pour l'éternité. Cependant, le temps des épreuves est venu pour le roi, plus solitaire que jamais. Une série de deuils vont, au cours des quinze dernières années, assombrir sa vieillesse: en 1701 meurt son frère Philippe et Jacques il d'Angleterre. Puis, en 1711, le Grand Dauphin est emporté par la petite vérole; l'année suivante, la duchesse et le duc de Bourgogne meurent de la même épidémie, suivis de leur fils aîné. Le trône revient au cadet, le duc d'Anjou, arrière-petit-fils de Louis XIV. Ces malheurs accablent le roi qui, avec lassitude, continue de travailler, présidant les conseils et les cérémonies.
  
Le 1er Septembre 1715, il meurt à Versailles.
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Le ter Septembre 1715, il rend l'âme à Versailles.
  
 
Madame de Maintenon se retire définitivement à Saint-Cyr et meurt quatre ans plus tard.
 
Madame de Maintenon se retire définitivement à Saint-Cyr et meurt quatre ans plus tard.
Ligne 509 : Ligne 461 :
 
*'''PASCAL (Blaise):''' 1623-1662. Savant, penseur et écrivain français. PERRAULT (Charles): 1628-1703. Ecrivain français. Membre de l'Académie française en 1671.
 
*'''PASCAL (Blaise):''' 1623-1662. Savant, penseur et écrivain français. PERRAULT (Charles): 1628-1703. Ecrivain français. Membre de l'Académie française en 1671.
 
*'''PHILIPPE d'ORLEAHS''' (Du, Ir-YSIEUR à la mort de Gaston _.Isis XIV. Epoux d'Henriette
 
*'''PHILIPPE d'ORLEAHS''' (Du, Ir-YSIEUR à la mort de Gaston _.Isis XIV. Epoux d'Henriette
*'''PHILIPPE IV d'ESPAGNE:''' Père de l'infante Marie d'Anjou, puis duc d'Orléans): 1640-1701. Appelé (frère de Louis XIII) en 1660. Fr-ère cadet de d'Angleterre, puis de la Princesse Palatine. 1605-1665. Roi d'Espagne. Successeur de Philippe Thérèse (femme de Louis XIV).
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*'''PHILIPPE IV d'ESPAGNE:''' Père de l'infante Marie
*'''PHILIPPE V d'ESPAGNE:''' 1683-1746. Roi d'Espagne en 1700. Second fils du Grand Dauphin. Petit-fils de Louis XIV. Porta d'abord le titre de duc d'Anjou. Succéda à Charles II d'Espagne. Marié à Marie-Louise Gabrielle de Savoie, puis I Elisabeth Farnèse.
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d'Anjou, puis duc d'Orléans): 1640-1701. Appelé (frère de Louis XIII) en 1660. Fr-ère cadet de d'Angleterre, puis de la Princesse Palatine.
 
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1605-1665. Roi d'Espagne. Successeur de Philippe Thérèse (femme de Louis XIV),
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*'''PHILIPPE V d'ESPAGNE:''' 1683-1746. Roi d'Espagne en 1700. Second fils du
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ccéda à Charles II d'Espagne. Marié à Marie-Louise Gabrielle de Savoie, puis I Elisabeth Farnèse.
 
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*'''RACAN (Honorat de Bueil, marquis de):''' 1589-1670. Poète français. Académicien et soldat.
 
*'''RACAN (Honorat de Bueil, marquis de):''' 1589-1670. Poète français. Académicien et soldat.

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