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Modification de Villes/Nice/Université populaire/CR/527 mars - L'anti-violence selon Etienne Balibar (2)
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==Son de l'atelier== | ==Son de l'atelier== | ||
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==Présentation== | ==Présentation== | ||
Présentation par Roman, basée sur : | Présentation par Roman, basée sur : | ||
− | * la conférence donnée par Etienne Balibar en 2014 intitulée "Violence | + | * la conférence donnée par Etienne Balibar en 2014 intitulée "Violence and civility revisited" : |
** Lien de la vidéo 1 : https://www.youtube.com/watch?v=MXvfNiyI8C8 | ** Lien de la vidéo 1 : https://www.youtube.com/watch?v=MXvfNiyI8C8 | ||
** Lien de la vidéo 2 : https://www.youtube.com/watch?v=RQTADrhSPDw | ** Lien de la vidéo 2 : https://www.youtube.com/watch?v=RQTADrhSPDw | ||
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* 3ème critère : la désutilité radicale où les êtres humains deviennent superflus, où on passe de l'exploitation à la destruction. Il y a deux aspects à ce critère : l'organisation de l'élimination des êtres humains de manière industrielle, et le fait de considérer certains êtres humains comme totalement inutiles, même pas dignes d'être utilisés pour être exploités. | * 3ème critère : la désutilité radicale où les êtres humains deviennent superflus, où on passe de l'exploitation à la destruction. Il y a deux aspects à ce critère : l'organisation de l'élimination des êtres humains de manière industrielle, et le fait de considérer certains êtres humains comme totalement inutiles, même pas dignes d'être utilisés pour être exploités. | ||
− | Le passage de la violence dans l'extrême violence dépend de la manière dont les sujets humains vivent et ressentent la chose, et notamment de leur réaction : est-ce qu'ils apprécient la situation, est-ce qu'ils la prennent en compte ? etc. et donc le fait que les gens victimes de l'extrême violence sont conscients de celle-ci et se mettent à essayer de résister commence déjà à les faire sortir de l'état d'extrême violence | + | Le passage de la violence dans l'extrême violence dépend de la manière dont les sujets humains vivent et ressentent la chose, et notamment de leur réaction : est-ce qu'ils apprécient la situation, est-ce qu'ils la prennent en compte ? etc. et donc le fait que les gens victimes de l'extrême violence sont conscients de celle-ci et se mettent à essayer de résister commence déjà à les faire sortir de l'état d'extrême violence. |
Il ajoute ensuite 3 autres critères en plus : | Il ajoute ensuite 3 autres critères en plus : | ||
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Mais si Étienne Balibar fait la distinction entre ultra-objectif et ultra-subjectif, c'est bien pour montrer que le premier est entièrement déterminé par les mécanismes destructeurs économiques du capitalisme, et le deuxième y est lié, mais est aussi lié à d'autres composantes irrationnelles qui selon Balibar ne servent pas bien les intérêts de l'économie, bien qu'il y ait de gros profits à faire aussi en de telles périodes. | Mais si Étienne Balibar fait la distinction entre ultra-objectif et ultra-subjectif, c'est bien pour montrer que le premier est entièrement déterminé par les mécanismes destructeurs économiques du capitalisme, et le deuxième y est lié, mais est aussi lié à d'autres composantes irrationnelles qui selon Balibar ne servent pas bien les intérêts de l'économie, bien qu'il y ait de gros profits à faire aussi en de telles périodes. | ||
− | [Petite remarque perso ici : Il existe un mécanisme très connu de Marx que sur lequel de nombreux intellectuels s'appuient, c'est la baisse tendancielle du | + | [Petite remarque perso ici : Il existe un mécanisme très connu de Marx que sur lequel de nombreux intellectuels s'appuient, c'est la baisse tendancielle du profit, qui fait que le capitalisme produit trop et arrive dans une situation où la seule manière de maximiser le profit quand tous les marchés ont été conquis c'est de détruire les marchandises. Donc on pourrait dans une certaine mesure contester que les génocides ou les guerres ne soient aps des conséquences directes de l'économie. Balibar doit bien sûr savoir ça vu qu'une de ses premières œuvres a été la co-écriture de "Lire le Capital", et il serait intéressant de connaître sa réponse.] |
'''Concernant maintenant la violence ultra-objective''', Étienne Balibar dit qu'elle se décompose essentiellement en deux aspects : | '''Concernant maintenant la violence ultra-objective''', Étienne Balibar dit qu'elle se décompose essentiellement en deux aspects : | ||
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#* et puis ce que Marx avait appelé l'achèvement de la "Soumission réelle" du travail au capital : <br />Citation de Balibar : "dans la forme d'une incorporation de la consommation, de la santé, de l'éducation, de la vie affective, et généralement des fonctions de "formation" et "d'individuation" de l'être humain, au circuit d'accumulation du capital financier - ce que les économistes néolibéraux appellent l'émergence du "capital humain"" | #* et puis ce que Marx avait appelé l'achèvement de la "Soumission réelle" du travail au capital : <br />Citation de Balibar : "dans la forme d'une incorporation de la consommation, de la santé, de l'éducation, de la vie affective, et généralement des fonctions de "formation" et "d'individuation" de l'être humain, au circuit d'accumulation du capital financier - ce que les économistes néolibéraux appellent l'émergence du "capital humain"" | ||
− | On peut donc dire sur ces deux versants de la cruauté que d'une certaine manière, dans le capitalisme contemporain, le capital se déplace de zone en zone pour tirer tout le profit qu'il peut, avant de l'abandonner totalement dévastée. Il détruit tant les humains, les civilisations dans leur diversité, que l’écosystème. Et c'est notamment ça (cette violence extrême ultra-objective) qui cristallise ensuite les identités désespérées | + | [Remarque perso : là dessus je trouve que Balibar s'éloigne de Marx chez qui il y avait un "sens de l'histoire", le communisme devait succéder au capitalisme de manière aussi inévitable que le capitalisme avait succédé à la monarchie. Pour Balibar c'est pas du tout sûr, depuis l'échec soviétique la thèse de Marx en a pris un coup et le capital peut très bien s'adapter, dévaster telle zone pour aller à une autre, puis y revenir pour la redévaster quand elle commence à repartir etc.] |
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+ | On peut donc dire sur ces deux versants de la cruauté que d'une certaine manière, dans le capitalisme contemporain, le capital se déplace de zone en zone pour tirer tout le profit qu'il peut, avant de l'abandonner totalement dévastée. Il détruit tant les humains, les civilisations dans leur diversité, que l’écosystème. Et c'est notamment ça (cette violence extrême ultra-objective) qui cristallise ensuite les identités désespérées engendrant le versant ultra-subjectif de la violence extrême. | ||
[remarque personnelle : De manière générale Etienne Balibar est très mesuré. A chaque fois qu'il dit quelque chose, il s'empresse de le tempérer en pointant que ce n'est pas le seul aspect, que ça ne s'applique pas entièrement, que ça n'explique pas tout non plus, que tirer les choses au clair est compliqué etc.] | [remarque personnelle : De manière générale Etienne Balibar est très mesuré. A chaque fois qu'il dit quelque chose, il s'empresse de le tempérer en pointant que ce n'est pas le seul aspect, que ça ne s'applique pas entièrement, que ça n'explique pas tout non plus, que tirer les choses au clair est compliqué etc.] | ||
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===La civilité face à la violence extrême=== | ===La civilité face à la violence extrême=== | ||
− | La civilité est constituée des moments où l'extrême violence est repoussée ou redirigée vers autre chose, où les sujets réussissent à se réinventer comme sujets politiques pour l'éviter. On ne peut vraiment repérer ces moments avec certitude que rétrospectivement en disant "Il y a eu là de la civilité, l'extrême violence aurait pu submerger les acteurs mais elle a été contenue" | + | La civilité est constituée des moments où l'extrême violence est repoussée ou redirigée vers autre chose, où les sujets réussissent à se réinventer comme sujets politiques pour l'éviter. On ne peut vraiment repérer ces moments avec certitude que rétrospectivement en disant "Il y a eu là de la civilité, l'extrême violence aurait pu submerger les acteurs mais elle a été contenue". Et du coup si on se trouve dans une période d'extrême violence il ne faut pas simplement chercher la paix ou la réconciliation. Il faut chercher des formes de politique nouvelles qui "auront permis" de dissiper l'extrême violence quand on regardera notre situation depuis le futur.<br />Il y a donc une sorte de cercle d'introspection et d'anticipation dans le fait de chercher des moments de civilité. Avec cette technique on peut plus facilement repérer des moments de civilité dans l'histoire comme par exemple les luttes de classe du 20ème siècle qui ont permis des conquêtes sociales, et dont on comprend mieux l'ampleur maintenant que les politiques néolibérales s'y attaquent. |
Etienne Balibar esquisse un début de méthode pour engager des actions de civilité : il propose de s'attaquer au cœur de ce qui caractérise l'extrême violence : | Etienne Balibar esquisse un début de méthode pour engager des actions de civilité : il propose de s'attaquer au cœur de ce qui caractérise l'extrême violence : | ||
* Par exemple si le capitalisme crée un processus de désutilité des gens, il faut œuvrer pour que chacun retrouve son utilité, en trouvant des moyens pour que les gens délaissés par le capital puissent donner le meilleur d'eux-mêmes aux autres. | * Par exemple si le capitalisme crée un processus de désutilité des gens, il faut œuvrer pour que chacun retrouve son utilité, en trouvant des moyens pour que les gens délaissés par le capital puissent donner le meilleur d'eux-mêmes aux autres. | ||
− | * De la même manière on peut envisager des stratégies de civilité sur les grands axes comme l'écologie, ou encore la violence transnationale. Pour le cas de la violence transnationale on peut résister aux identités imaginaires d'où pourrait apparaître une violence ultra-subjective avec la recherche irrationnelle de la pureté. Il faut aussi faire attention avec les frontières parce qu'elles ont tendance à s'épaissir : on finit par traquer ceux qui passent avant la frontière mais aussi après, et on aboutit à une militarisation progressive de la société. Il propose de démocratiser les frontières pour s'opposer à leur militarisation. Il s'agirait de trouver des moyens d'étendre des droits égaux entre les citoyens des deux côtés de la frontière, de permettre le passage de ceux qui veulent passer mais sans détruire la frontière non plus, et dans la mesure du possible de chercher à être dans la réciprocité.<br />Etienne Balibar propose de faire de cette cause de militance une cause classique de même que la régulation des banques, la conquête de la liberté religieuse, de la liberté sexuelle etc. | + | * De la même manière on peut envisager des stratégies de civilité sur les grands axes comme l'écologie, ou encore la violence transnationale. Pour le cas de la violence transnationale on peut résister aux identités imaginaires d'où pourrait apparaître une violence ultra-subjective avec la recherche irrationnelle de la pureté. Il faut aussi faire attention avec les frontières parce qu'elles ont tendance à s'épaissir : on finit par traquer ceux qui passent avant la frontière mais aussi après, et on aboutit à une militarisation progressive de la société. Il propose de démocratiser les frontières pour s'opposer à leur militarisation. Il s'agirait de trouver des moyens d'étendre des droits égaux entre les citoyens des deux côtés de la frontière, de permettre le passage de ceux qui veulent passer mais sans détruire la frontière non plus, et dans la mesure du possible de chercher à être dans la réciprocité.<br /> |
+ | Etienne Balibar propose de faire de cette cause de militance une cause classique de même que la régulation des banques, la conquête de la liberté religieuse, de la liberté sexuelle etc. | ||
Exemples de civilité dans le présent qu'on peut essayer d'identifier comme tel : | Exemples de civilité dans le présent qu'on peut essayer d'identifier comme tel : | ||
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Etienne Balibar fait par ailleurs remarquer que la plupart de ces exemples de civilité viennent de la société civile, constituée d'ONG, de mouvements de type Occupy ou Nuit Debout etc. alors que les États se cantonnent plus à des mini actions humanitaires, souvent liés à la militarisation. | Etienne Balibar fait par ailleurs remarquer que la plupart de ces exemples de civilité viennent de la société civile, constituée d'ONG, de mouvements de type Occupy ou Nuit Debout etc. alors que les États se cantonnent plus à des mini actions humanitaires, souvent liés à la militarisation. | ||
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====Sur la question de la police==== | ====Sur la question de la police==== | ||
Une personne dans l'audience pose la question de la police, et du fait qu'elle soit toujours plus développée dans nos régimes, et toujours plus répressive : | Une personne dans l'audience pose la question de la police, et du fait qu'elle soit toujours plus développée dans nos régimes, et toujours plus répressive : | ||
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Et donc il pense que la police est en un sens nécessaire. Même si il ne se fait pas d'illusion sur la capacité des citoyens à contrôler "démocratiquement" la police, il pense qu'ils ont quand même certains leviers d'action pour éviter les dérives. Pour lui la police est typiquement une institution issue du monde autoritaire qu'il faut en priorité lutter pour contrôler démocratiquement, de même que les frontières pour prendre un autre exemple. | Et donc il pense que la police est en un sens nécessaire. Même si il ne se fait pas d'illusion sur la capacité des citoyens à contrôler "démocratiquement" la police, il pense qu'ils ont quand même certains leviers d'action pour éviter les dérives. Pour lui la police est typiquement une institution issue du monde autoritaire qu'il faut en priorité lutter pour contrôler démocratiquement, de même que les frontières pour prendre un autre exemple. | ||
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+ | ===Parcours d'Etienne Balibar et questionnements=== | ||
==Discussion== | ==Discussion== | ||
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