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L' écriture et l'école

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Avec la lecture et le calcul, l'écriture est traditionnellement considérée comme un apprentissage instrumental de base que l'école est chargée de transmettre. Est-ce encore une priorité à la fin du XXe siècle ? Et dans cet enseignement, quel est le rôle de l'école maternelle par rapport à l'école élémentaire ?

Qu'est-ce qu'écrire ?[modifier | modifier le wikicode]

On doit faire une distinction entre au moins deux grandes significations. Ecrire, c'est produire un texte écrit, c'est rédiger : on écrit une lettre d'amour, un article de journal, une déclaration d'accident... Il s'agit d'un acte de communication qui relève de la fonction linguistique. Le code écrit comporte de notables différences avec le code oral. L'expression écrite doit donc faire l'objet d'un apprentissage linguistique spécifique, au niveau de la syntaxe en particulier.

Écrire, c'est aussi dessiner ou imprimer, produire d'une façon ou d'une autre les signes visuels (lettres, mots, paragraphes...) qui composent le texte écrit. C'est produire la matérialité du message écrit, qu'on en soit l'auteur ou seulement le transcripteur ou le copiste. Il s'agit d'un acte ou plutôt d'un montage d'actes moteurs, appuyés sur des repérages sensoriels (surtout visuels) permettant de respecter des contraintes conventionnelles qui définissent la «lisibilité» d'un écrit. Selon qu'il s'agit d'écriture manuscrite ou non, l'apprentissage correspondant comporte des éléments communs (reconnaissance des lettres, repérage dans l'espace...) et des éléments plus spécifiques selon le support considéré : l'écriture manuscrite suppose une coordination motrice et un contrôle du tonus plus fins et surtout le montage d'automatismes plus compliqués que l'utilisation d'un clavier ou le collage d'étiquettes...

Les deux aspects de l'écriture (« expression écrite» et «geste graphique ») sont étroitement liés mais ne sont pas indissociables. On peut dicter un texte sans l'écrire soi-même et on peut «recopier» des mots sans comprendre ce qu'on «écrit». Ces situations sont particulièrement fréquentes à l'école.

Support de calendrier. Les parents de nationalités étrangères ont été sollicités pour écrire dans leur langue maternelle, du fait justement de l'incapacité complète ou partielle des jeunes enfants à dominer la totalité de l'acte d'écrire. Cette dissociation va progressivement s'atténuer puis disparaître au fil de l'apprentissage de la lecture et de l'écriture.

Si l'enseignement de l'écriture a été jusqu'ici une des missions esentielles de l'école (« lire, écrire, compter »), l'évolution de la société depuis Jules Ferry, et en particulier le développement des techniques de communication, ne mettent-ils pas en question la nécessité d'apprendre à écrire ?

Place de l'écrit dans la société[modifier | modifier le wikicode]

Nous vivons dans une société de culture écrite. L'histoire montre l'importance capitale, pour un pays de droit comme la France, de la «chose écrite ». Il suffit de penser aux codes juridiques, à l'état-civil, aux actes de propriété... Dans une telle société, quiconque ne sait pas manier l'écrit est, en pratique, exclu du pouvoir social et tributaire d'autrui pour les actes les plus humbles de la vie quotidienne (envoyer un mandat ou compléter une feuille de sécurité sociale...). Même dans les sociétés de culture essentiellement orale, savoir lire et écrire confère un pouvoir éminent, à la fois symbolique (prestige), économique et politique, voire religieux. Il suffit de penser aux prêtres et aux scribes de Mésopotamie ou d'Égypte ou, plus près de nous, au clergé du Moyen-Âge.

On peut penser que l'importance de l'écrit tend à se réduire avec l'apparition et le développement des techniques audio-visuelles d'enregistrement et de communication. Mais pour le moment, l'écrit reste le moyen le plus souple et le plus fiable de conserver et de communiquer l'information, même si la technique offre de nouveaux supports et de nouveaux modes de communication. L'usage de l'écrit reste indispensable dans bien des secteurs de la vie publique et privée. Ainsi, l'information scientifique, aujourd'hui, ne peut être transmise que par l'écrit. Les communications orales (conférences et colloques) ne sont qu'un moyen de signaler une découverte, pas véritablement de la communiquer. De même, jusqu'à ce jour, les tribunaux n'accordent pas la qualité de « preuve» à un enregistrement sur bande magnétique... En revanche dans d'autres domaines, tels que la correspondance privée, le téléphone peut souvent remplacer avantageusement la rédaction d'une missive. Le choix du support écrit prend alors une signification particulière (affective ou contractuelle...).

On peut donc affirmer sans crainte que, pendant de longues années encore, l'écrit gardera une place importante dans notre société.

Cela signifie-t-il qu'il restera nécessaire que tout le monde sache écrire, et surtout sache écrire à la main ? L'écriture manuscrite n'est-elle pas destinée à laisser la place à l'écriture mécanique ou électronique ? Et dans ce cas, l'école doit-elle continuer à imposer à tous les enfants cet apprentissage difficile ? Aussi longtemps que les moyens d'impression à usageprivé (machine à écrire, imprimante, enregistreurs divers) ne seront pas d'un usage suffisamment répandu et utilisables par chaque individu en toute situation, il sera nécessaire de recourir, au moins à certains moments, à l'écriture manuscrite. Pour le moment donc, il est indispensable que l'école continue à l'enseigner à tous.

L'apprentissage systématique de l'écriture est une des tâches essentielles du cours préparatoire, mais non de l'école maternelle.

Même si des moments d'enseignement systématique ont leur place ou sont inévitables à l'école maternelle, ce n'est pas parce qu'on estime nécessaire que les enfants connaissent l'alphabet et sachent former toutes les lettres en fin de section de grands. C'est parce que beaucoup d'enfants de cet âge souhaitent écrire et qu'il vaut mieux enseigner les gestes graphiques de base que de laisser s'installer des automatismes grapho-moteurs défectueux, conséquence inévitable d'un apprentissage «sauvage ».

L'école maternelle a pour finalité de développer toutes les capacités de chaque enfant et de lui donner les moyens d'aborder avec les meilleures chances de réussite la scolarité obligatoire. L'écriture ne peut donc avoir à l'école maternelle la même place qu'à l'école élémentaire; non seulement sur le plan quantitatif, mais aussi quant à son statut. Même en section de grands, l'écriture n'est qu'une activité parmi d'autres.

Les textes réglementaires d'ailleurs évitent de fixer un niveau d'exigence précis en ce qui concerne l'écriture à l'école maternelle, ils ne formulent ni recommandation ni interdiction d'aborder un apprentissage systématique et ne mentionnent aucune méthode : «L'écriture proprement dite est préparée par des activités de graphisme. En grande section, il est normal que les enfants écrivent leurs nom et prénom, ainsi que des mots simples. Les signes graphiques sont l'objet de la part des enfants de remarques qui demeurent de l'ordre de l'observation. » (Circulaire n° 86 - 046 du 30 01 86).

L'écriture met en jeu des compétences qui sont développées également dans d'autres activités (éducation physique, travaux manuels, dessin...). Mais cela ne signifie pas que l'éducation physique, les travaux manuels, etc. soient des moyens pédagogiques pour atteindre un but qui serait d'apprendre à écrire.

L'écriture à l'école maternelle=[modifier | modifier le wikicode]

En d'autres termes :

  • les activités d'écriture ont le même statut que les autres activités et prennent place dans une organisation du temps analogue à celle d'autres activités.
  • Si des enfants, ou même la majorité du groupe classe parviennent en fin de section de grands sans savoir tracer correctement toutes les lettres de l'alphabet, il ne faut pas y voir nécessairement un échec. On peut prédire de meilleures chances de réussite au C.P. à un enfant qui ne sait pas encore former ses lettres mais qui a construit de solides repères dans l'espace, développé le goût du savoir, acquis un bon contrôle des gestes de sa main, qu'à un enfant qui est capable de nommer et de «dessiner» de nombreuses lettres mais n'est pas intéressé par les livres et ne sait pas s'orienter dans l'espace... (figure 1, page 73) ;
  • dans les classes maternelles où sont organisées des séances d'enseignement systématique de l'écriture, le plus important n'est pas le résultat matériel (la perfection du graphisme) mais le respect par l'enfant du tracé orienté et l'assimilation des règles de l'écriture.

Suivre un tracé, exercice difficile pour un jeune enfant: le regard doit précéder le geste de la main au lieu de le suivre.

une planification à long terme

Il résulte un certain nombre d'exigences ou de nécessités pour l'enseignant.

  • Prendre en compte dans ses objectifs l'ensemble des compétences que l'enfant mobilise pour écrire, c'est-à-dire les définir avec précision et réfléchir à l'ordre des acquisitions, de la section de petits à la section de grands (liaison entre les instituteurs d'une même école pour déboucher sur une programmation des objectifs et des activités) (figures 2, 3, 4 et 5, pages 74 et 75). Ce travail d'harmonisation et de coordination ne doit évidemment pas faire perdre de vue la spécificité de chaque niveau, relatif à l'âge des enfants : il ne faudrait pas que la section de moyens se réduise à être une préparation à la section de grands et que la section de petits devienne une classe préparatoire à la moyenne section...
  • Distinguer avec la plus grande clarté les buts et démarches différents et complémentaires de l'école maternelle d'une part, de l'école élémentaire d'autre part. Pour cela, la connaissance des textes officiels est un préalable nécessaire mais non suffisant. Une expérience des deux niveaux est souhaitable, ou au moins des échanges et une réflexion commune entre enseignants. Le but n'est pas de mettre au point des pratiques identiques ou de plier l'un des niveaux aux exigences de l'autre, mais de bien définir la complémentarité des rôles de chacun, dans le respect des textes réglementaires.
  • Se donner les moyens de connaître avec précision les acquisitions, les possibilités, les difficultés des enfants, de façon à ajuster constamment ses propositions d'activités et ses modes d'intervention au groupe-classe dans son ensemble et à chaque enfant en particuiler (évaluation). Seule l'observation permet de juger si les enfants sont prêts à aborder l'apprentissage de l'écriture. Un des signes est le plaisir qu'ils manifestent. Si le travail proposé par l'enseignant est ressenti comme trop pénible, c'est que les consignes ne sont pas satisfaisantes ou que certaines acquisitions préalables manquent. Il faut alors combler ces lacunes. Brûler les étapes ne servirait à rien d'autre qu'à accroître l'anxiété ou le désintérêt face aux apprentissages scolaires.