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Villes/Nice/Université populaire/CR/471 mars - Gandhi et la non violence en politique

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Gandhi et la non violence en politique[modifier | modifier le wikicode]

471 mars (14 juin 2017)

Audio de l'atelier[modifier | modifier le wikicode]

https://www.youtube.com/watch?v=igKjVemHKOI

Présentations[modifier | modifier le wikicode]

Présentation de Gandhi et de ses actions par Christophe Jaffrelot[modifier | modifier le wikicode]

Quelques notes prises suite à cette vidéo de France Culture : https://www.youtube.com/watch?v=ZLrFfnJemjg

Gandhi : né en 1869, de la caste Bania, caste de commerçants. Sa famille pratique la politique.
Il étudie le droit en angleterre d'abord, et c'est là bas aussi qu'il étudie les textes traditionnels indiens.

Dans sa non violence il y a un héritage indien et un héritage occidental :

  • Une origine indienne :
  1. ahimsa (non violence) : c'est un mot clé dans la philosophie Jaïn, doctrine contemporaine du Bouddhisme. Ils disent que la nature est un tout, et que toute violence exercée contre un animal est répréhensible. Les Jaïn portent sur la bouche un voile pour ne pas avaler de moucherons ou balayent devant leurs pas pour ne pas écraser de fourmis.
  2. le renoncement vis-à-vis de l'action : on n'agit pas en fonction des fins de l'action mais on en est détaché.
  • Une origine chrétienne :
    "tends l'autre joue" le message du Christ touche Gandhi. Réagir par le sacrifice, par le renoncement à la violence qui nous vient.

Mais il ne faut pas négliger que bien qu'il n'y ait pas de violence physique dans l'action de Gandhi, il y a bien une certaine violence morale. Gandhi utilise le sacrifice pour faire du chantage (ça vient de la tradition Brahmanique, quand le Brahmane veut faire payer celui qui lui doit de l'argent, il entame une grève de la faim devant chez lui, parfois en se lacérant, pour le faire céder) pour exercer une contrainte morale.

D'ailleurs Gandhi était aussi un tyran domestique, sur sa femme, ses enfants. Par exemple dans les années 1910 Gandhi impose à sa femme de nettoyer les latrines pour affaiblir l'idée de castes, et quand elle refuse il se met à ne plus manger pour la forcer finalement à le faire. Pareil pour ses fils, il s'est opposé à un mariage de son fils avec une musulmane, et à chaque fois ça marchait. Un de ses fils est devenu alcoolique.

Et c'est pareil au niveau public. Ex : en 1932 il entame une grève de la faim illimitée contre un rivale, Ambedkar. Il y a des manifestations multiples dans toute l'Inde et le rivale finit par céder (il aurait sans doute fini lapidé si il avait été responsable de la mort de Gandhi).
Pour la petite histoire Ganghi voulait réformer le système de caste, mais pas l'abolir comme le voulait Ambedkar, et c'est sa vision qui s'est imposée parce qu'il était le plus fort avec son action non violente.

Gandhi crée sa méthode d'action non violente et invente un mot pour la désigner : satiagraha (l'étreinte de la vérité). C'est une méthode de protestation non violente de désobéissance civile, qui prétend défendre le vrai avec force.

Point intéressant : Gandhi ne croyait pas ne la démocratie mais en les êtres éclairés qui peuvent mener les masses en dictateurs bienveillants.

Les actions :

  • En 1915 il revient en Inde après avoir passé du temps en Angleterre et en Afrique du Sud. En 1919 il entame son 1er grand mouvement de non coopération, consistant à boycotter tout ce qui représente l'Etat colonial (produits, tribunaux etc.). Les anglais paniquent, ils tirent dans la foule. Et ca crée un mouvement encore plus grand suite à ce choc.
    Le problème c'est qu'il est difficile de garder la discipline dans la durée. Une foule supposée non violente finit par incendier un bureau de police. Gandhi arrête alors le mouvement et va en prison pendant 6 ans, il veut expier ce crime. Pour lui la discipline est capitale.
  • Le 2ème mouvement a lieu en 1931 ("la marche du sel") : il va s'attaquer à l'impôt sur le sel que doivent payer les indiens aux britanniques. Il entame une grande marche vers la mer, avec de plus en plus de gens qui le suivent en marchant. Il va alors ramasser du sable et du sel de manière illégale, et sera arrêté avec des tas d'autres gens. 60 000 personnes se laissent emprisonner.
    Dans les esprits il y a une révolution culturelle qui amorce la sortie de l'empire, mais c'est surtout la 2ème guerre mondiale qui précipitera vraiment le départ des anglais qui ne pouvaient pas tenir un si grand empire.
  • Le dernier grand mouvement que lance Gandhi "quit india" en 1942. Il est immédiatement arrêté avec ses proches disciplinés, et les autres du mouvement qui ne sont pas arrêtés s'adonnent à du terrorisme contre les britanniques. Gandhi déplore ça depuis sa prison.
  • Les années 46-47 sont des années d'émeute entre hindous et musulmans. Des milliers de personnes vont mourir. Ghandi se précipite à chaque fois sur place et entame une grève de la faim pour que les gens déposent les armes. Ca marche à chaque fois, jusqu'à Dahli où il est assassiné par un nationaliste hindou qui le trouvait trop modéré vis-à-vis des musulmans.

Il y avait en parallèle de Gandhi un autre mouvement qui se basait sur les mêmes références religieuses, et la personne qui l'a tué justifiait comme ça son assassinat, en disant que Gandhi et son action était un danger pour l'Inde, avec un Pakistan dangereux qui se formait à ses frontières.

Présentation de Gandhi sur le plan philosophique et idéologique[modifier | modifier le wikicode]

La non-violence est un élément clé de la pensée gandhienne. Elle est tellement au cœur de celle-ci qu’on pourrait dire qu’elle fait le lien entre ses conceptions religieuses et ses idées politiques. Pour Gandhi, en effet, la religion ne doit pas être séparée de la politique, mais, bien au contraire, c’est elle qui doit guider toute action politique, sociale et économique. Même l’art doit faire penser à Dieu sous peine de n’être qu’une « beautification de l’immoralité » . La politique sans religion est « saleté absolue ». La non-violence est à la fois un principe religieux et une méthode d’action politique. C’est elle qui doit régir le rapport entre l’Homme et la nature, mais aussi les relations des hommes entre eux.

C’est bien sûr dans la tradition jaïn que l’on trouve l’affirmation la plus radicale de la non-violence. Dans toute l’histoire de l’Inde, les conflits se sont réglés par la force. De même, la plupart des Indiens, tant s’en faut, ne sont pas végétariens. Il existe cependant, au sein de la grande tradition indienne, et notamment parmi les brahmanes, un courant qui fait de l’ahimsa une valeur cardinale.

Gandhi s’appuiera sur cette tradition pour faire de la non-violence le concept le plus fondamental de sa pensée. Toutefois la non-violence de Gandhi est empreinte d’éléments qui ne sont pas spécifiquement hindous : nous pensons particulièrement aux idées de charité et surtout d’amour qui sont, pour lui, indissociables de la non-violence. Souvent, lui-même traduit ahimsa par « amour ». « La conscience de l’unité entre les hommes se manifeste par l’amour du prochain, car sans amour la vie n’est que souffrance… Aime celui qui t’a fait du mal, que tu condamnes.» Ainsi la non-violence n’est plus, chez Gandhi, une loi passive, mais un mode de vie devant imprégner toute action et toute relation.

Elle implique, sans aucun doute, la condamnation de toute agression physique et de l’usage de la force, physique ou armée, en général. Le « tu ne tueras point » s’étend ici à l’ensemble des êtres vivants, ce qui explique, bien sûr, le végétarisme. Les textes où Gandhi parle de la non-violence sont très nombreux, mais aussi très épars. Une fois encore ils ne manquent pas d’ambiguïtés, voire de contradictions. Bien que Gandhi veillât à la défense des animaux, et affirmât que la vie d’un agneau avait, pour lui, autant d’importance que celle d’un homme , il ne se montra pas toujours cohérent sur ce point et il n’hésita pas à approuver l’abattage de 60 chiens enragés dans la ville d’Ahmedabad. Il fut aussitôt assailli d’un abondant courrier lui reprochant cette prise de position. Plus tard, il fit tuer un veau malade dans l’enceinte même de l’ashram. Une fois encore, les lettres fusèrent.

C’est peut-être sa fougue à l’encontre des « sectaires de l’ahimsa » qui l’amena, de façon pour le moins surprenante, à prendre position en faveur de l’euthanasie qu’il considère comme conforme aux principes de la non-violence : il ne s’agit, selon lui, que de soulager l’âme des douleurs que le corps lui inflige.

Ces quelques exemples nous montrent combien il est difficile de saisir sa pensée en matière de non-violence. Certes, il faut reconnaître que, dans les actions qu’il a lui-même menées, il a prôné la désobéissance civile, la résistance et le boycottage. Il met en exergue la fermeté, certes, mais aussi le compromis, la persuasion et la discussion. Néanmoins, les mouvements de masse qu’il a lancés ont, très souvent, entraîné des violences.

La non-violence entendue par Gandhi concerne principalement l’usage de la force physique. Il est moins convaincant quant à la violence morale et lui-même utilisa cette arme, notamment dans la grève de la faim. A propos du jeûne, on voit bien que, dans une tradition ascétique, Gandhi ne rejette pas la violence physique exercée sur soi-même, c’est-à-dire la mortification. La souffrance est alors vue comme libératrice, sinon rédemptrice : « Nous n’obtiendrons le salut que par la souffrance », écrit-il. Lors des campagnes qu’il mène, il appelle au « sacrifice de soi », à d’autres moments il affirme que la souffrance est la seule forme de repentir. Enfin il considère que la pénitence est un principe de la religion hindoue, la souffrance est purifiante et source de joie.

Pour ses actions politiques, par contre, il conçut une méthode de lutte non violente qu’il appela satyagraha, « la force de la vérité ». C’est en Afrique du Sud que Gandhi conçut cette méthode.

Préférant donner à cette méthode d’action un nom d’origine indienne, il énonce lui-même les règles fondamentales, le code de discipline et les étapes des campagnes d’action  : l’accent est mis sur la mobilisation et la diffusion des objectifs. L’essentiel doit être tenu pour non négociable, mais la porte à la négociation doit toujours être ouverte. Les participants doivent être prêts à souffrir sans jamais manifester leur propre colère. Ils doivent s’abstenir de toute insulte et se laisser arrêter.

Parmi les actions menées par Gandhi sous le mode du satyagraha, on peut citer la grève des ouvriers textiles de 1918, l’agitation contre les Rowlatt Bills de 1919, la campagne des paysans de Bardoli de 1928, la marche du sel de 1930. A chaque fois, on est frappé par la détermination précise des objectifs, la qualité de l’organisation, le caractère symbolique de la lutte et l’utilisation de la presse comme moyen de diffusion du message.

Le succès de ces actions tient aussi pour une bonne part dans la présence d’un chef. Gandhi tenait d’ailleurs à ce que chaque mouvement soit placé sous l’autorité d’une personne et que l’obéissance à cette personne soit totale. Cette condition, souvent négligée par les commentateurs, est pourtant essentielle à la réussite des actions. Tant qu’elles restaient sous le contrôle de Gandhi ou de l’un de ses proches, elles tendaient à se conformer aux idéaux affirmés. Par contre, lorsqu’ils échappaient à tout contrôle, ces mouvements tendaient à dégénérer.

Gandhi ne pense pas que les masses puissent agir d’elles-mêmes. l est conscient de l’exigence de ses méthodes et fait de l’obéissance au chef un des principes de l’action. Dans un discours prononcé en Europe, il déplore l’absence de leaders spirituels qui permettraient aux Européens de mener une lutte non violente.

On peut distinguer plusieurs types de jeûne : le premier est une simple mortification qui n’a d’autre but qu’une élévation spirituelle ou une manière de résoudre des problèmes de santé. Ce dernier, comme bon nombre de ses compatriotes, a régulièrement pratiqué ce type de jeûne. Ainsi entendu, il n’est pas anodin puisqu’il présuppose une capacité de résister à la douleur et un contrôle de ses désirs. Dans le second type, le jeûne devient grève de la faim ; il est alors arme politique, un moyen de faire pression sur l’ennemi en mettant sa propre vie en jeu.

Lorsqu’il met sa vie en jeu pour que cessent les massacres entre hindous et musulmans, il est seul contre tous. Il utilise son corps comme sa seule arme face à une violence aveugle. Par contre, dans la lutte qui l’opposa à Ambedkar, il jeûna d’une façon qui tient quasiment du chantage politique, en forçant son adversaire à céder sous peine d’être tenu pour seul responsable de sa mort.

En Afrique du Sud, Gandhi était entouré de nombreux Occidentaux et sa pensée était influencée par les théosophistes, Tolstoï, Thoreau ou Ruskin. Au cours de sa vie, Gandhi en vint à concevoir l’Occident comme satanique. Il rejeta ainsi tout ce qui était considéré comme occidental : la culture, l’éducation, l’urbanisation, la médecine, la recherche du profit, le matérialisme, les vêtements, les machines et les beaux-arts. Les commentateurs de l’œuvre de Gandhi tendent à ignorer cet aspect de sa pensée. Il est pourtant essentiel, même s’il repose sur une conception manichéenne et simpliste du monde. Dans le premier livre qu’il ait écrit, Hind Swaraj, un puissant pamphlet politique, il affirme avec force que la civilisation est une maladie dont l’Inde doit se prémunir. Il rejette l’idée d’une Inde inspirée de l’Occident.

Même la démocratie parlementaire ne trouve pas grâce à ses yeux puisqu’il traite le Parlement de « femme stérile et de prostituée » , et il pèse ses mots : pas une seule bonne action n’est sortie des assemblées législatives. De retour en Inde, Gandhi assumera les conséquences de ses conceptions et il demanda aux Indiens de renoncer aux produits manufacturés et d’abandonner leur emploi dans l’administration. Dans le discours qu’il tient à Bénarès en 1916, il s’oppose à l’usage de la langue anglaise dans l’enseignement. Plus tard, il incita les jeunes gens à quitter les universités, même contre l’avis de leurs parents, et proposa de substituer le filage à l’enseignement universitaire.

Les valeurs proposées par Gandhi ne correspondaient pas nécessairement à celles des leaders de la décolonisation. En même temps, il réaffirmait la grandeur de l’Inde, il proposait un monde nouveau, si pas égalitaire du moins consensuel. Il faisait de la tradition un atout pour l’avenir. L’Inde affirmait-il n’avait pas été prise par les Anglais, elle s’était donnée à eux parce qu’elle avait renié la force qu’elle avait en elle-même.

L’idéal de Gandhi est, sans doute, plus proche d’une démocratie directe et décentralisée. Il était en principe opposé à un État centralisé et, dans les dernières décennies, il lutta pour la régénération du village comme entité fondamentale de la vie du pays. Il admirait l’idéal égalitaire du communisme et il s’opposait au principe même de « propriété privée ». Il n’est d’ailleurs pas éloigné de la théorie marxiste de la valeur quand il affirme qu’un bien n’appartient à personne et qu’il est constitué du travail successif de plusieurs personnes . Cependant, il ne pouvait accepter l’athéisme qui sous-tend le marxisme. Enfin, il est également opposé aux modèles d’industrialisation et de centralisation qui caractérisaient la Russie soviétique.

Gandhi rejette tout autant le capitalisme, au moins en théorie, car, dans la pratique, il était en contact étroit avec des industriels dont certains finançaient ses activités. C’est une des raisons pour lesquelles les marxistes de l’époque le considéraient comme un agent de la bourgeoisie nationale dont le rôle principal était d’empêcher toute révolution prolétarienne en Inde . Par bien des aspects, il est vrai, la pensée gandhienne peut paraître conservatrice, notamment par son accent sur la religion, la tradition ou la nation.

Néanmoins, il n’est pas sûr qu’il puisse légitimement être considéré comme un « réactionnaire » ou encore un partisan du statu quo. Dans un sens, il est un même vrai révolutionnaire. En tout cas, il met en cause les fondements mêmes de la politique et de l’économie. Son projet de société s’inscrit en rupture avec les formes antérieures. Sur le plan politique, par exemple, il est en faveur d’une décentralisation radicale du pouvoir et un retour aux communautés de village, même si, rappelons-le, il ne mit pas sur pied des institutions pour mettre ces idées en pratique. En résumé, on dira que sa pensée est avant tout une utopie, et qu’à ce titre elle échappe aux catégories politiques traditionnelles.

Parmi les critiques les plus sévères de Gandhi figure Rabindranath Tagore, le poète indien, prix Nobel de littérature. Dès 1919, Tagore, qui avait été le premier à l’appeler mahatma, lui fait part de sa préoccupation vis-à-vis du nationalisme gandhien. Il dénonce la politique de boycottage des biens étrangers qui, selon lui, ne fait qu’attiser les sentiments les plus frustes et abjects de ses compatriotes. L’anti-occidentalisme est également rejeté par Tagore qui craint de voir l’Inde se développer à l’écart du monde . « Aucun peuple ne peut faire son salut en se détachant des autres », affirmait Tagore, selon lequel le nationalisme était une menace en lui-même . Lors du mouvement de désobéissance civile, Tagore est « suffoqué » par ce qu’il voit, par la soumission aveugle des masses à leur chef, par la mise à l’écart de toute raison et de toute culture . Tagore écrivit à Gandhi pour lui dire que la résistance passive n’est pas morale en elle-même et qu’elle peut elle aussi trahir la vérité. De façon symptomatique, Gandhi lui répondit qu’il n’avait rien à faire du sort de l’humanité, mais que seul le bien-être de son pays le préoccupait.

Gandhi, souligne Rolland, refusa de voir que ceux qui brûlent les étoffes en criant son nom sont prêts à s’attaquer aux hommes et Tagore a eu raison de dire que, tout en prêchant la non-violence, on a semé les graines de la violence. Les émeutes et les agressions qui suivirent devaient d’ailleurs lui donner raison.

Comment la non-violence protège l’État par Peter Gelderloos[modifier | modifier le wikicode]

Le livre en français est là : https://paris-luttes.info/home/chroot_ml/ml-paris/ml-paris/public_html/IMG/pdf/peter_gelderloos_-_comment_la_non-violence_protege_l_etat_fr_et_avant-propos_.pdf

Ce livre de Peter Gelderloos a été traduit par le site paris-luttes.info, par des personnes visiblement proches des black blocs qu'on connait en France et qui sont les fameux "casseurs" en tête des manifs.

Ils reprochent aux pacifistes ou non-violents d'être bornés, de mettre la non-violence devant la transformation sociale elle-même. Ils reprochent aux pacifistes de s'allier avec les sociaux libéraux pourvu qu'ils soient non violents, plutôt qu'avec les révolutionnaires si jamais ils sont violents.

Et ils reprochent surtout aux pacifistes de criminaliser et isoler systématiquement les personnes qui envisagent des actions violentes, alors que selon eux seule la diversité des tactiques (violentes et non violentes) peut être efficace. Et criminaliser des camarades de lutte est la pire des choses à faire parce que ça constitue une division qui profite au système en place.
Ce point de vue me paraît important parce qu'il a traversé nuit debout et traversera probablement encore les mouvements sociaux futurs.


Peter Gelderloos essaye de montrer dans le livre que depuis toujours seules les diversité de tactiques ont pu être efficaces dans les luttes. En 6 chapitres il montre de en détail pourquoi c'est mauvais de se limiter à la seule non-violence.

Il montre d'abord que la non-violence est inefficace. Pour ça il prend plusieurs exemples historiques célèbres de victoire par la non violence pour montrer qu'à chaque fois une partie de l'histoire est occultée.

Pour le cas de l'Inde, il dit :

De façon significative, l’histoire se souvient de Gandhi plus que de tous les autres non pas parce qu’il représentait la voix unanime de l’Inde, mais de par l’attention particulière que lui porta la presse britannique et la prééminence que lui valut le fait d’être pris comme interlocuteur lors d’importantes négociations avec le gouvernement colonial britannique. Si l’on se rappelle que l’histoire est écrite par les vainqueurs, une autre strate du mythe de l’indépendance indienne s’effrite.
Sont ainsi passés sous silence d’importants dirigeants militants comme Chandrasekhar Azad, qui combattit les armes à la main contre les colons britanniques, et des révolutionnaires comme Bhagat Singh, qui s’attira un soutien massif en commettant des attentats à la bombe et des assassinats au profit d’une lutte visant le renversement du capitalisme tant indien que britannique.

Globalement pour le cas de l'Inde il nous dit que si les Britanniques sont partis c'est surtout à cause des pertes dues à la 2ème guerre mondiale, et parce que les mouvements de protestation non violents avaient montré qu'ils pouvaient basculer à tout moment dans la violence, et que la Grande Bretagne ne pouvait pas contenir ça. Au lieu de ça elle a choisi la technique néo-coloniale, elle a désigné le gouvernement et a favorisé la division éthnique de l'Inde, pour continuer à en profiter de loin, comme elle le fait encore aujourd'hui.

Ensuite il nous dit que le pacifisme est paternaliste et "raciste".

Le pacifisme présuppose que les Blanc-he-s qui ont grandi dans des banlieues pavillonnaires, et en obtenant satisfaction de tous leurs besoins de base, peuvent conseiller aux personnes opprimées, dont un grand nombre sont des personnes de couleur, de subir patiemment une violence indiciblement plus grande que celle qu’ils ont connue eux-mêmes, jusqu’au jour où le Grand Père Blanc se laissera émouvoir par les exigences du mouvement, ou bien que les non-violent-e-s parviendront à la légendaire « masse critique ».

C'est un peu le reproche qu'on a fait aux gens de nuit debout (ou aux bobos en général) vis à vis des gens des quartiers.

["Au premier abord, la non-violence semble être une position morale limpide qui n’a pas grand chose à voir avec la race. Cette conception est fondée sur le présupposé simpliste que la violence est avant tout quelque-chose que l’on choisit. Mais quels sont les gens qui, en ce monde, ont le privilège de choisir la violence, et quels sont les gens qui vivent dans des conditions violentes qu’ils le veuillent ou non ? En général, la non-violence est une pratique privilégiée, qui trouve son origine dans l’expérience des Blanc-he-s, et elle ne fait pas toujours sens pour des gens qui ne bénéficient pas des mêmes privilèges qu’eux, ou pour des Blanc-he-s qui essaient de détruire le système de privilège et d’oppression"]

Troisièmement le pacifisme est étatiste : la non-violence assure un monopole de la violence à l’État. Et d'ailleurs on peut remarquer que l'Etat favorise systématiquement la démarche pacifiste et criminalise immédiatement toute démarche violente. Pourtant les exemples où l'Etat se débarrasse des radicaux gauchistes quand ils lui paraissent dangereux sont nombreux.
La position des pacifistes se base sur une vision naïve de la réalité où l'Etat serait un acteur neutre qui réagirait aux pressions des conservateurs et progressistes, et non pas un instrument d'opression structurel. On pourrait alors le faire basculer de notre côté simplement en gagnant la bataille morale et en convainquant l'Etat de nous soutenir dans notre désir de progrès social.

Ensuite le pacifisme est patriarcal. Il essentialise souvent les femmes qui devraient subir la violence dans la passivité et le pacifisme du simple fait de leur sexe, alors que dans les faits elles sont tout à fait capables de prendre part à des actions y compris violentes, et l'ont historiquement fait.

Cinquième point : la non violence est stratégiquement inférieure. Elle a quatre principales stratégies qui sont le plan moral, l'approche lobbyiste, la création d'alternatives et la désobéissance généralisée.

  1. L'approche morale consiste à essayer au maximum d'informer la masse des gens pour les faire adhérer à la révolution. Mais même si à court terme elle peut avoir une efficacité, à long terme elle ne permettra rien parce que le pouvoir en place dispose de mécanismes structurels bien plus puissants pour endoctriner les gens. Et la deuxième raison est que même en étant informés, les gens ont besoin de plus que ça pour aller jusqu'à risquer un changement menaçant leur identité profonde dans ce système.
  2. L'approche lobbyiste consiste à monter un lobby pour peser sur le gouvernement ou le parlement, pour obtenir quelque chose. Le problème c'est qu'elle est systématiquement inefficace parce que le gouvernement peut l'ignorer si elle va contre ses intérêts et favoriser les démarches qui vont dans son intérêt, pour corrompre la démarche des lobbyistes qui finissent en général par trahir la cause initiale. Et au pire le gouvernement peut faire semblant d'accepter la requête du lobby pour refaire à nouveau ce qu'il veut un peu plus tard ou en changeant le nom du projet (c'est par ex le cas pour hadopi et le tafta qui sont revenues sous mille formes et sont finalement passées). Le problème de l'approche lobbyiste est qu'elle mobilise des ressources énormes pour très peu de résultats. Si on utilisait ces ressources pour une approche plus menaçante on obtiendrait peut être plus facilement des choses.
  3. La création d'alternatives est un peu ce qu'on fait à Nuit Debout, et plus largement ce que font des gens comme Jérémy avec son refuge autogéré. Le problème c'est qu'à chaque fois que de telles actions deviennent menaçantes pour l'Etat et son image, il se débrouille pour les réprimer. On a par exemple vu les policiers évacuer la place de la République à Paris au bout d'un moment. Mais c'est encore plus flagrant avec les expériences d'autogestion à travers l'histoire. Si on reste dans la non violence, l'alternative qu'on crée sera tôt ou tard attaquée et détruite.
  4. Enfin la désobéissance généralisée constitue à boycotter massivement, faire la grève, des blocages etc. C'est en soi une bonne tactique, mais le fait de se cantonner à la non-violence fait qu'elle n'aboutit jamais à donner le pouvoir au peuple. A chaque fois que l’état est en crise à cause de ce genre d'événements il choisit soit en dernier ressort d'utiliser la violence armée pour écraser les pacifistes et remettre de l'ordre, sachant qu’économiquement c'est pas top, soit il choisit de faire semblant d'abdiquer, et met en place un autre régime qui lui est favorable, c'est le cas par exemple des récentes révolutions arabes. Là encore avec la diversité des tactiques et en s'autorisant y compris la violence, on pourrait prendre le pouvoir au moment le plus crucial et ne pas se faire avoir ni écraser dans la violence.

L’argument qui revient souvent chez les non-violents (c'est celui qu'avait mis en avant Xavier Renou quand il nous avait fait la formation à l'action non violente) c'est que par l'action non-violente ils s'attirent plus la sympathie du grand nombre que par l'action violente. Gelderloos affirme que ce n'est pas forcément le cas. Ce qui compte ce n'est pas le degré de violence mais la légitimité avec laquelle le grand nombre perçoit le mouvement en question. Et il donne des exemples aux Etats Unis de mouvements violents qui ont été massivement soutenus, et de mouvements non violents qui ne l'ont pas été.

Et enfin la non violence est une illusion, parce que la violence est un concept flou, Gelderloos conclut le chapitre par :

Rien, dans le monde actuel, ne mérite le nom de paix. Il s'agit plutôt de savoir quelle est la violence qui nous effraye le plus, et de quel côté nous choisissons de nous placer.

Il veut mettre fin à la dichotomie entre violence et non violence pour que les mouvements décident des actions adaptées à la situation sans être dans une idéologie de la défaite assurée face à l’État qu'est la non violence.

Discussion[modifier | modifier le wikicode]

Partie 1 : Gandhi[modifier | modifier le wikicode]

  • D'un côté Gandhi est autoritaire, et de l'autre il est pour le communisme, ce n'est pas un peu contradictoire ?
    • Lorsque Gandhi organise une action il est là pour la non violence, mais en quoi ça empêche une autre forme d'autogestion dans l'action ?
      • Il considérait que les masses ont besoin d'un chef pour agir.
  • Est-on obligé d'être totalement "clean" dans la violence en totalité ou peut-on tolérer des écarts si l’action globale est dans la non violence et que la non violence est érigée en principe ? Gandhi a par exemple agi comme agent recruteur de l'armée Britannique. Est-ce que c'est une incohérence impardonnable ?
    • Est-ce que la non-violence est si importante que ça pour considérer qu'on la respecte en permanence ou pas et devenir impardonnable au moindre écart ?
      • Justement on peut considérer que la non violence est un principe qui devient un mode de vie et non pas quelque chose à respecter à la lettre et où il faudrait surveiller le moindre faux pas.
  • L'action de Gandhi est non violente mais elle comporte aussi une part de violence dans la mesure où il s'agit d'imposer sa volonté à autrui à travers le fait de se faire soi-même du mal. L'exemple d'Ambedkar est parlant.
    • Les non violents renoncent à la violence mais pas au rapport de force.
  • Qu'est ce que la violence ? Est-ce qu'on peut la délimiter ?
    • A priori c'est la violence physique, les biens matériels en sont exclus, mais il est difficile d'en tracer les contours.
      • Mais il y a aussi la violence sociale.
      • Et il y a aussi la violence psychologique comme le fait de ne pas adresser la parole à quelqu'un.
      • Il est certes difficile à tracer les contours, mais on peut clairement dire pour certaines actions (par exemple l'assassinat) qu'elles sont violentes, et pour certaines autres qu'elles sont clairement non violentes.
      • Il y a différents niveaux de violence : la violence faite au corps par le travail, la violence au niveau de la relation etc. etc. la violence structurelle est très complexe et difficile à mettre en évidence.

Partie 2 : Le livre de Peter Gelderloos[modifier | modifier le wikicode]

  • Sur Xavier Renou, son approche n'est pas si pacifiste que ça, ils ont mené des actions y compris violentes.
  • La dichotomie entre violence et non violence n'est pas forcément pertinente, les choses ne sont pas aussi simples. On s'enferme dans quelque chose de manichéen.
    • C'est aussi ce que pense Peter Gelderloos.
  • Pourquoi privilégier le fait de parler de ce sujet qui laisse la place à la violence au lieu d'approfondir la non violence en elle-même ?
    • [Roman : Même après coup cette question me laisse sans voix. On est exactement dans la non-violence dogmatique dont parle Gerderloos, le principe de la non-violence est posé comme premier devant la raison elle-même, comme un principe juste et bon par lui-même sans avoir besoin de justification préalable ni de mise à l'épreuve de la réflexion.]
  • Si selon Gelderloos la violence est relative, alors comment considérer que les personnes racisées subissent une violence plus grande ? Si tout est relatif on ne peut pas dire que la non-violence soit raciste.
    • Il est difficile de tracer les contours de la violence, mais on peut quand même comparer différents niveaux de violence, tout n'est pas relatif selon Gelderloos.
      • Peut-on vraiment quantifier la violence ?
        • Il faut aussi voir que chacun d'entre nous ne vit pas de la même manière la violence. On peut compter le nombre de gens qui se font contrôler, mais on ne peut pas quantifier comment chacun d'eux le vit.
          • Cet argument est valable sur le plan individuel, par contre il perd beaucoup de valeur quand on s'intéresse à un groupe d'individus : dans chaque groupe d'individus il y des gens sensibles aux contrôles et des gens moins sensibles.
          • Mouai enfin si on se fait contrôler 30 fois par jour qui peut trouver ça peu violent ? A un moment donné il y a quand même des choses que pratiquement tout le monde trouverait violent.
  • Sur l'aspect paternaliste l'argument est un peu facile, on peut dire ça de tout. Le principe de non violence veut créer les fondements des échanges entre les personnes.
  • Sur le patriarcat, la non-violence ne prône pas la passivité dans les cas d'agression individuelle.
    • Gelderloos ne parle pas de la violence individuelle pour l'argument sur le patriarcat, mais de la violence des femmes dans les mouvements sociax, laisser le choix aux femmes d'adopter elles-aussi des actions violentes dans les mouvements sociaux si elles le veulent.
      • Le but du féminisme c'est de s'émanciper de la condition imposée aux femmes, pas de prendre la place des hommes pour faire de la violence à leur place. On peut dire que les femmes choisissent plutôt la non violence.
      • Et c'est même plus généralement "ne vous révoltez pas" ou "ne vous exprimez pas sur un mode qui dérange".
  • Gerderloos a une idée machiavélique du monde. Les républiques qui sont dans un état de paix doivent être considérées comme tel. Si il n'y avait pas de paix la non-violence ne chercherait pas cette paix-là...
    • Il est anarchiste et considère que la présence de l'Etat implique une violence permanente et structurelle, donc les républiques en peix ne peuvent pas exister à moins d'être des anarchies (et à part quelques tribus isolées il n'y a pas d'anarchies dans le monde, il n'y a que des Etats).
  • Citations de Gandhi : "Vis comme si tu devais mourir demain", "La vie est un mystère qu'il faut vivre et non un problème à résoudre", "Le bonheur c'est quand nos actes sont en accord avec nos paroles"
  • On ne peut pas parler de violence sans parler de non violence et inversement. Chaque concept a besoin de son complémentaire pour exister. C'est une dualité complémentaire.
    • On peut être actif tout en étant non violent. On n'a pas forcément besoin de la violence. Il faut réfléchir à comment faire pour que la situation de violence n'arrive plus.
  • Le fait qu'il y ait de la violence c'est aussi du au fait de vouloir les choses vite. La non violence est le meilleur moyen mais c'est un processus sur la durée.
  • Il y a de la violence constructive, et de la violence non constructive. La violence constructive c'est par exemple celle qu'on exerce sur soi-même (par exemple en faisant un régime). Il faut essayer de tourner la situation pour toujours avoir quelque chose de constructif.
    • On peut aussi se poser la question de savoir si se poser des contraintes à soi-même c'est vraiment de la violence ou si on ne peut qualifier de violence que quelque chose fait contre la volonté de quelqu'un.
  • Le cas des anthropophages dans certaines civilisations on trouve pas pas violent, et dans d'autres on trouve ça violent, donc il y a aussi des aspects culturels dans le niveau de la violence.
    • D'accord mais quand il y a de la domination c'est quelque chose d'assez obljectif, on peut considérer que la domination est une forme de violence.
      • Il y a la servitude volontaire qui fait que des gens ne trouvent pas violent des dominations exercées sur eux.