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Villes/Paris/Vocabulaire/CR/20 avril 2016

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Atelier du 20 avril 2016 : Le mot « (Biens) Communs »[modifier | modifier le wikicode]

Le troisième atelier de la commission Vocabulaire et Réappropriation du langage a porté sur le terme “(Biens) Communs”. A partir de quelques pistes théoriques tirées de plusieurs conférences de Benjamin Coriat (qui est d’ailleurs intervenu sur la Place de la République le 10 avril avec la Commission Communs), nous avons commencé par distinguer les “biens communs” des “communs”.

En effet, d’après Coriat, un commun est défini par trois propriétés. C'est :
1) Une ressource tangible ou intangible en accès ouvert (prairie, logiciel…)
2) Un système de droits de propriété partagée : droits d’accès, droit de prélèvement, droit de management, droit de céder la ressource, droit d’usage…
3) Une structure de gouvernance assurant la reproduction de la ressource et la reproduction des commoners.
Coriat ajoute qu’un commun ne se constitue pas comme un contrat de travail (sous la forme d’une subordination) mais à la manière d’une libre association, et qu’il faut une forme de puissance publique pour gérer les communs et pour les développer. Par ailleurs un bien commun est selon lui :
1) La même chose qu’un commun sans la structure de gouvernance.
2) Non pas une relation des personnes aux choses mais une relation des personnes entre elles vis-à-vis de la chose : le climat, par exemple.
A partir de ces réflexions, nous avons essayé de distinguer la propriété de l’appartenance. Quel que soit le type de propriété dont on parle (privée, publique, partagée), elle implique un système de gouvernance pour gérer les rapports interindividuels vis à vis des choses appropriées. Au contraire, ce que nous avons appelé appartenance est ce qui concerne chaque individu dans son rapport au monde. Certes, chacun entretient une relation aux choses mais pas forcément toujours sur le mode de l’appropriation. L’appartenance est de ce point de vue co-extensive : l’individu appartient à son milieu de vie, à un milieu technique, etc. et en retour les choses qui constituent ces milieux (Umwelt en allemand) appartiennent à l’individu.

Nous avons ensuite évoqué le fait que certaines choses nous sont “communes” sans pour autant que leur gestion ne nous revienne ni que la décision de les rendre communes ne nous ait appartenu. Par exemple la langue Française, qui a d’abord été rendue officielle par le roi François 1er (la fameuse ordonnance de Villers-Coterêts de 1539) avant de prendre, à travers l’école de la Troisième République et les télécommunications (radio, TV...) une place hégémonique vis à vis des dialectes locaux. Aujourd’hui, même si en fait nous pouvons inventer des mots, ou déplacer le sens de mots existants, nous n’avons aucun pouvoir de droit sur leur signification officielle (c’est le rôle réservé à l’Académie Française). De même nous n’avons aucun pouvoir sur la gestion de la langue Française en tant que langue commune. En tant que “chose qui nous est commune”, la langue n’est pas forcément un commun à part entière. L’exemple n’est pas forcément le plus à propos (car la langue est une chose “immatérielle” qui change tout le temps, contrairement à une place publique ou à un logiciel), mais il permet de montrer qu’il faut différencier le commun (choisi et géré ensemble) de l’homogène, imposé à tous (ce qui est homogène dans la langue n’étant pas la langue elle-même mais le fait qu’elle est l’unique langue de référence).

Nous avons ensuite réfléchi, à partir du modèle du logiciel libre et des licences Copyleft et Creative Commons, à la manière dont il serait possible de reproduire un tel modèle de commun dans d’autres sphères (artistique, politique, etc.). Il nous est apparu que pour que cela soit possible, il faudrait définir des modes de rétribution des commoners (ceux qui apportent leur contribution à un commun comme ceux qui, au départ, partage leur travail sous la forme d’un commun). Si l’œuvre partagée est en accès libre, il faut envisager des modes de redistribution qui rémunèrent la contribution (cf. le mot “Travail”).

En somme nous avons conclu que "le commun se réconcilie mal avec le marché" et qu’il fallait à la fois définir une économie des communs (rétribuer les commoners) et une démocratie basée sur les communs : chacun devrait en effet avoir un droit d’accès aux communs, c’est-à-dire aussi à leur gestion et à leur production.

Bibliographie partielle :[modifier | modifier le wikicode]

Benjamin Coriat (dir.) - Le retour des communs. La crise de l’idéologie propriétaire

Pierre Dardot et Christan Laval - Commun. Essai sur la révolution au XXIème siècle

Jakob Von Uexküll - Milieu animal et mileu humain (sur la notion d’Umwelt).